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DE LA DÉCADENCE ROMAINE. 455 nuit. On élevait des oies principalement pour le duvet et pour le foie. Le duvet servait a confectionner des objets, de literie, et se récoltait deux fois l'an, au printemps et à l'au- tomne. Le foie se recommandait aux gourmets, et l'oie était surtout engraissée dans le but de le développer autant que possible, car il ne me paraît pas que l'on fit grand cas de la chair. Je ne décrirai pas les nombreux procédés d'engrais- sement des oies ; il me suffira de dire qu'ils favorisaient singulièrement la croissance du foie. Quand il avait été ex- trait de l'animal, on en augmentait encore considérablement le volume, en le plongeant dans du lait miellé. La gloire de cette découverte est partagée entre Scipion Métellus, homme consulaire, et M. Seius, chevalier romain, du même temps. On ne peut pas dire lequel des deux fit faire a la cuisine ce grand progrès, lanlum bonum. C'était probablement d'un foie d'oie, soumis à cette opération, que parle Martial dans le distique suivant : Adspice quam tumeal magno jccur ausere tnajus ! Miratus dices : hoc, rogo, crevit ubi? xm. 58. Vous admirez combien ce magnifique foie Surpasse à vos regards le volume d'une oie , Et vous me demandez, dans votre étonnement, Quel animal a pu lui donner logement ? Héliogabale, ce grand progressiste dans la matière, faisait naturellement peu de cas des souvenirs les plus patriotiques — le progrès les a en horreur — et pour montrer un esprit dégagé de préjugés traditionnels, il nourrissait des chiens, les traîtres qui avaient livré le Capitole, avec les foies des oies vigilantes, des oies consacrées a Junon, qui sauvèrent les Romains dans leur dernier asile. Messalinus Cotta, fils de l'orateur Messala, imagina un singulier ragoût : il faisait rôtir les palmes des pattes d'oies et les accommodait avec des crêtes de coqs. Pline, qui rap-