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452 DE LA DÉCADENCE ROMAINE. 11 est a présumer qu'on ne se contentait pas d'immerger simplement la volaille, mais qu'on la retenait assez long- temps dans le liquide , pour qu'elle fût complètement noyée. Nos contemporains mangent les crêtes de coq ; ils en gar- nissent leurs sauces et leurs pâtés. Ils ont même poussé si loin l'industrie qu'ils sont parvenus a les fabriquer : on prend des palais de bœuf; on les découpe au moyen d'un emporte- pièce qui a la forme des crêtes, et le tour est joué. Je ne pré- sume pas que lafinessede goût des Romains se fût contentée de cette contrefaçon. Le malheureux cuisinier, qui eût es- sayé de duper ainsi l'estomac de son maître , se fût exposé a voir son crime sévèrement puni. La gastronomie avait poussé l'art de la dégustation excessivement loin : nous avons vu déjà qu'Héliogabale voulait que les crêtes, servies sur sa table, fussent arrachées aux coqs vivants. Selon toute apparence, il dut avoir de nombreux imitateurs, et les mal- heureux volatiles furent soumis a un affreux supplice. La pratique seule pourrait enseigner à différencier les résultats gastronomiques de ces diverses méthodes, et s'il prenait fantaisie à nos gourmands de se donner Héliogabale pour modèle, la société protectrice des animaux aurait, je pense, le droit d'intervenir. Les crêtes de coq ne servaient pas seulement à la satisfaction du sens du goût, on leur faisait encore l'honneur de les sacrifier aux dieux Lares. — Lamp. in Heliog. 19. — Juv. xm, 283. La recette un peu compliquée, donnée par les auteurs , pour parvenir à engraisser le pigeon , et le prix exhorbitant auquel se vendait une paire sans défaut, prouvent que cette petite volaille était tenue en très-grande estime. On lui don- nait pour abri, ainsi que nous le faisons de nos jours, des tourelles construites au - dessus de la maison, et comme on laissait aux pigeons la faculté de sortir et de rentrer au logis , on imagina un excellent moyen , afin de les em-