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                        M. DE M1REC0URT.                     413

    La machine est montée et la tirade pourrait tourner a
l'infini, mais le tour est fait, et le biographe passe a d'autres
exercices. Le procédé de dénaturer une question pour l'es-
quiver remonte aux âges les plus reculés du sophisme;
cette phrase ronflante et au fond dénuée de sens rappelle
deux vers de Boileau :
        « Un affreux serrurier, laborieux Vulcain,
        « Qu'éveillera bientôt l'ardente soif du gain. »

   Le sieur Boileau ayant fermement résolu de donner un
équivalent français a l'auri sacra famés latin, ne trouva rien
de plus ingénieux que d'appliquer sa traduction à un mal-
heureux serrurier. Ainsi, un ouvrier qui travaille et sue, dès
l'aube, pour gagner sa vie, est éveillé par Y ardente soif du gain;
autant vaudrait dire Y ardente soif de trente sous de salaire.
   De même, selon M. de MireCourt, les indigents qui man-
quent de pain ne souffrent que parce qu'ils n'ont pas de
bifteck, d'or et de joies sensuelles.
   Telle est la façon dont le biographe contourne et défigure
les questions qu'il n'ose aborder de front. Il est facile, au
reste, de prendre la mesure de ses connaissances en le
suivant dans la biographie de quelques hommes spéciaux.
On peut affirmer qu'il n'a pas lu les ouvrages de Proudhon,
et qu'il en parle par ouï-dire et d'après les citations et les
appréciations qu'il a trouvées toutes faites dans les journaux
du temps. Lisez cette biographie, et si vous ne connaissiez pas
les doctrines de Proudhon avant votre lecture vous ne serez
pas plus avancé après. M. de Mirecourt a prudemment reculé
devant une exploration au-dessus de ses forces. Il a fait de
Proudhon une caricature d'ogre reflétée des silhouettes
grotesques des petits journaux de l'époque, mais il n'a pas
dit un mot de son système et pour cause. Il en est de même
pour Lamennais ; on trouve dans sa biographie des injures
vides et déclamatoires, mais on ignore complètement quel