Revue du Lyonnais » série 2 - n°13 ( 1856 ) » pp.194

194               DE LA DÉCADENCE ROMAlNli.
Messaline et Agrippine, et meurt empoisonné par un plat de
champignons, que celle-ci lui fait servir. Néron met sa prin-
cipale volupté à voir couler le sang, et son génie invente des
supplices. C'est un grand comédien : il chante, il joue de la
lyre, il court dans les cirques, il fait construire la maison dorée,
domus aurea, et il triomphe dans le temple d'Apollon Palatin.
Il veut régénérer la vieille Rome, et dans quelques heures il la
démolit par l'incendie. Du haut de la tour de Mécènes, il jouit
d'un spectacle vraiment grandiose, et il illustre son Å“uvre
par un chant sur la destruction de Troye. C'est le triomphe
de la ligne droite: elle rajeunit la ville, ouvre des rues larges,
et efface jusqu'aux traces des monuments les plus vénérables.
   Que font a Néron les souvenirs d'Hercule et d'Evandre, du
Vélabre et du Lupercal? Il n'a pas de préjugés mesquins:
c'est un progressiste quand même. Galba est promptement
assassiné parles prétoriens, et Othon l'efféminé, qui s'appli-
quait du pain mouillé sur les joues pour entretenir la
fraîcheur de son teint, se suicide, après la bataille de Bebria-
cum. Vitellius ne règne que peu de mois; cependant il a
le temps de devenir célèbre par sa gourmandise et sa glou-
tonnerie. L'art de bien et de beaucoup manger n'arrive
pourtant pas encore aux dernières limites du progrès : « cernas
et Filellii et Aficii vieil Heliogabalus, Héliogabale surpassa
dans ses repas Vitellius et Apicius. » — LAMPUID. XXIII. —
   11 paraîtrait d'après Tacite, — km. m, 55 — qu'il y eut
sous Vespasien un temps d'arrêt dans le luxe et la prodigalité
des festins ; ce que l'historien attribue à la modération et à la
frugalité du prince. Si la chose est véritable, si Tacite ne flatte
pas un peu le maître, cet arrêt ne fut certainement pas de
longue durée, et même il est difficile d'y croire. En effet
Martial, contemporain des Flaviens, nous a laissé de curieux
et monstrueux détails sur les mœurs de ce temps, et je suis
porté a penser que le progrès dans la décadence non seule-