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180 LÉGENDE INDIENNE ni de l'alliance de Rainas avec les Vânaras agrestes, ni de la course merveilleuse de Hanuman, ni de la pompeuse description de Ceylan. Toutes ces scènes d'une admirable poésie, inspirées par des faits authentiques, l'antagonisme de divers peuples qui se disputaient la possession de l'Inde, et la victoire des Aryas de race blanche sur la race nègre de l'Archipel et la race cuivrée du Décan, revivent maintenant dans plusieurs versions, dont l'une exprime complètement les beautés de l'original. Rientôt M. Gorresio, continuant son œuvre éminente, nous initiera aux combats si animés et si grandioses que se livrent les deux armées sur les bords de l'Océan indien. Déjà j'ai essayé de reproduire plusieurs de ces passages en vers latins ; énumérer tous ceux qui m'ont frappé depuis dans la lecture du texte non traduit, dépas- serait de beaucoup les bornes de cet écrit. Mais je ne puis résister au désir d'anticiper sur la traduction promise, en exposant ici la scène finale de cette guerre nationale et religieuse, scène où l'héroïsme païen s'élève, selon moi, à sa plus grande hauteur, et projeté, dans son brillant essor, un reflet de charité chrétienne (1). La ville de Lanka est prise, Rà vanas est tué par Râmas, les nègres de Ceylan sont soumis au vainqueur , et les Satyres, ses compagnons d'armes, célèbrent à I'envi son triomphe, lorsque Sîta, arrachée à la retraite où l'avait enfermée le tyran, est amenée devant son époux, qui la regarde silencieux et triste. Cette épouse qu'il a tant aimée, pour laquelle il s'est exposé à de si terribles dangers , est-elle restée pure et fidèle pendant cette longue séparation, et son peuple l'acceptera-t-il comme souveraine incontestée? Ce doute, exprimé à demi-voix, est compris par la vertueuse Sîta : les larmes aux yeux, elle s'avance vers Râmas, et, après quelques nobles paroles qui peignent l'in - nocence de son cœur, elle se tourne soudain vers l'autel allumé pour le sacrifice, invoque Agnis, le dieu tout pénétrant, scru- tateur des corps et des âmes, et se précipite dans les flammes, victime volontaire de sa foi. Aussitôt du haut de l'empyrée (1) Rà mà yan, livre VI, chants 100 à 104.