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JEAN PALEIWE. 37
entre les marchans. Et encores qu'ils ayenlà fr.irc à Mores et
Turcs, si est-ce qu'ils ne sont point obligez d'aller à la Justice
ïurquesque, tellement qu'arrivant un navire Chresticn, de quel-
que pays et contrée qu'il soit , hormis des Vénitiens , failli qu'il
mette la bannière, et armes de France entrant au port : car ainsi
le veut le grand seigneur, qui a donné ceste auctorilé au Rov
de France en ses Frantieques. dont s'aceomodent tous passa-
giers et pèlerins , se retirans chacun vers sa nation , au moins
aux villes maritimes , où il y en a. »
Ceci prouve de quel ascendant jouissait autrefois la France en
Orient. Suit une description assez animée de la ville d'Alexan-
drie, bien déchue même alors de sa splendeur ; Paterne la trouva
presque déserte. En quittant cette riche cité fondée par Alexan
dre et qui renferma la Bibliothèque des 700,000 volumes brûlés
par Omar , nos voyageurs , non sans avoir vivement senti la pi-
qûre des moustiques, arrivèrentà Rosette. Le 27 juillet, ils s'em-
barquent à bord d'une flottille. Attaqués par les Arabes , une
seule arquebusade met en fuite les assaillants, peu habitués sans
doute, à cette époque, au bruit de la poudre... Palerne n'oublie
pas, chemin faisant, de faire connaître son opinion personnelle
sur les sources du Nil ; nous ferons grâce au lecteur de ses com-
mentaires, mais ce qu'il ue faut pas passer sous silence c'est l'o-
pinion qu'il a sur le genre de mort qui menaçait les crocodiles
de son temps. Suivant lui, lorsque ces amphibies dormaient la
gueule ouverte, selon leur naturel , il suffisait qu'un petit oi
seau se lançât dedans, et leur piquât les entrailles , pour que
mort s'en suivît
Le Caire et ses merveilles saisissent vivement l'imagination de
notre voyageur ; il n'oublie pas non plus les esclaves chrétiens
et le marché où se'vendaient alors les membres de Jésus-Christ:
« Il y a deux ou trois rues près la place Caucalli, où se ven-
dent les pauvres esclaves Cbrestiens , où j'en ai vu plus de 400
pour un coup , la plupart desquels sont noirs : qu'ils desrobent
sur les frontières du Prete-Jan. Ils les font ranger par ordre con-
tre la muraille, tous nuds, les mains liées par derrière, afin qu'on