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356 ESTIENNE DU TRONCHET. « la pluspart desquels meubles, madame la Mareschale de Saint « André estant veuve, donna à Monsieur le prince de Condé, « avec la dite maison de Valéry , tout en pur don, pensanl « l'espouser. « Le Mareschal se montra un vray Lueullus en luxes, boni « bances et magnificences... » « Son visage ne portoit en sov « aucune façon cruelle, car il estoit fort beau et de bonne « grâce, la parole belle et l'esprit gentil, et bon jugement et « bonne cervelle. II avait pour devise le bras et l'épée d'Alexan- « dre coupant le nœud gordien avec ces mots : nodos virtute « resolvo. Après la mort de son premier maître, du Tronchet fut accusé auprès du Maréchal, par un de ses propres amis, d'avoir com- mis des malversations dans son office de trésorier du domaine de Forez. Sans examiner ce qu'il pouvait y avoir de faux ou de vrai dans une telle accusation, le Maréchal priva sur le champ du Tronchet de sa place et le fit mettre en prison. C'est ce qu'il nous apprend lui-même dans une épître : Jamais la liberté ne me scut commander : Maintenant la prison me la fait demander ; La prison me fait sage et m'enseigne de suivre Le train de la raison, quand je serai délivre, etc. Mais bientôt Monsieur de Saint-André ayant reconnu l'inno- cence de son secrétaire et les intrigues dont il avait été victime, lui rendit ses deux emplois. Plusieurs lettres de du Tronchet rou- lent sur cette affaire qui fut sans doute une des plus doulou- reuses de sa vie. Depuis ce temps, il ne jouit jamais d'une entière faveur auprès de son maître ; en plus d'une circonstance, il fut même sur le point d'être encore privé de sa trésorerie. Enfin, « ayant appris que M. de Saint-André vouloit transmettre « son office (de secrétaire) à une autre personne qui lui avoit « promis une finance plus forte, il prit la résolution de quitter « le service du Maréchal (1). (I) Bibliothèque franc-mue de l'abbé Goujet.