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                      DE SAINT-MARTIN D ' A W A Y .                      153

 doit-il pas nous transporter dans un monde réparé, refaire en
quelque sorte la créature de Dieu, ainsi qu'elle était sortie de
ses mains ? Or, la laideur alors n'existait pas. La laideur est ap-
parue avec le mal dans le monde, Dieu ne l'a pas faite : elle
n'est qu'une négation de la beauté. Il n'appartenait qu'à cette
école, qui a levé l'étendard eontre toute saine doctrine, d'intro-
duire le laid comme élément dans les œuvres de la littérature,
de la peinture ou de, la musique. C'était vouloir faire de l'être
avec du néant, de l'ordre avec du désordre, de l'harmonie avec
de la dissonance. La vraie tâche de l'artiste, au contraire, c'est
de s'élever à l'aide de l'idéal jusqu'à cette beauté primitive im-
primée à la forme humaine, avant qu'elle eût été défigurée par
la chute, et qu'elle retrouvera encore perfectionnée dans la gloire.
Or, c'est à notre avis, la forme grecque qui réalise le mieux ce
type de la beauté parfaite. C'est dans elle, en effet, que réside a»
souverain degré cette condition indispensable assignée par Platon,
et après lui par saint Augustin, au vrai beau, qui est la propor-
tion (1). Le plus bel éloge que l'on puisse faire de l'art grec, ce n'est
pas seulement de dire qu'il est noble, simple, naturel, d'autant
plus parfait qu'il est moins apparent, mais c'est de dire qu'il est
proportionné , qu'il n'est dans aucun excès, qu'il atteint ce mi-
lieu où la vérité habite, et que par couséquent, il offre une lan-
gue propre à exprimer toute idée et toute doctrine en rapport
avec ces caractères.
  On reconnaît très-certainement que les peintures de M. Flan-
drin ont passé par cet art, et si dans l'expression on trouve le
sentiment chrétien des âges de foi, dans la forme on trouve aussi
une étude approfondie des modèles antiques. Ses figures ont la
simplicité, la noblesse d'un bas-relief des Panathénées.
  On reproche au peintre de n'avoir pas composé son sujet, dans

   (/) II nous est permis, je pense, de traduire avec Antoine Arnaud par
le mot général de proportion, cette définition du beau qui se trouve au
chapitre XXXII du Traité de saint Augustin De Verà religione : « Ista visibi-
lia       Quœram ergo deinceps quarè sint pulchra ? Utrùm idèo quia
similes sibi partes sunt, et aliquà eopulatione ad suam convenientiain re-
diguntur. »