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6G LES TROIS CHAPELON. .s'achemina fort tristement vers Rome. Chemin taisant, il rencontra trois jeunes nobles vénitiens qui se dirigeaient, comme lui, vers la ville éternelle. L'air de l'abbé les prévint en sa laveur, ainsi que sa conversation spirituelle et originale,- ils furent touchés de son malheur, lui proposèrent de faire route ensemble , et lui offrirent de venir s'installer, au retour, à Venise, au sein même de leur famille, pour ne plus se quitter jamais. Ils lui promireni une position qui, bien que modes!e , ne laissa pas de. sourire au pauvre Chapelon , et , sans aucun doute , il aurait fini par l'ac- cepter, s'il n'eût entendu à quelques jours de là , comme nous le • errons bientôt, une phrase en patois , qui changea tout-à -enup •^es résolutions. Le gracieux accueil de ses jeunes amis ne pouvait lui faire oublier complètement la perte de son frère , rien d'ailleurs ne pouvait bannir de son cœur le mal du pays qui commençait à le gagner, ni les splendeurs de ce soleil oriental, ni les monuments en ruine de l'antique Rome , ni ces basiliques , trésors d'arehi lecture, légués par tous les siècles du christianisme. Chapelon commençait déjà , à regretter le ciel brumeux cl enfumé de San ieiicve , le foyer si plein de souvenirs . le cœur des siens , et le langage du pays pour lui si plein de charmes. Que lui importai; l'italien si pur que parlent les Romains ! Il eût donné volontiers cent conversations du meilleur toscan, pour une seule phrase de son cher dialecte. Ajoutez aux ennuis de l'exil cl d'une solitude à peu prè> complète , le manque d'argent, car il n'est guère probable qu'a près une aussi longue traite, il lui en restât beaucoup. Voici donc l'expédient dont il s'avisa pour trouver un compatriote à qui par 1er. Saint-Pierre de Rome étant le principal monument qui attire les étrangers , Messire Jean pensa que s'il se trouvait unForésien dans la ville il ne tarderait pas à le découvrir dans cette église. Il se rendit donc tous les jours à Saint-Pierre, et, se plaçant vers la porte principale , il adressait à toutes les personnes qui entraient une question des plus bouffonnes et des plus saugrenues , en langage stéphanois. Elle nous a paru un peu trop crue pour trouver place dans cet