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212 DES ORIGINES DU DEVOIE. nous espérons montrer combien ces accusations sont grosses d'inconséquences, ou de préventions injustes. Non seulement le livre de M. Jules Simon ne contient rien qui soit implicite- ment contradictoire avec la foi chrétienne, mais encore ilouvre vers elle une magnifique avenue, qu'il compose avec ces vérités sur lesquelles le christianisme s'appuie, comme sur ce qu'il y a de meilleur dans notre nature, el qu'il vient couronner. Comment, disent-ils, fonder un ordre réel sur cette raison de l'homme que la vengeance divine a foudroyée et qu'elle a remplacée par une lumière miraculeuse dans sa source, sa durée el sa destination ? qu'est-ce qu'un traité de morale qui ne tient pas compte de ces deux grandes choses, la dé- chéance et la grâce ? La philosophie étudie l'homme dans sa nature que la dé- chéance a pu amoindrir ou abaisser, mais qu'elle n'a pas dé- truite. Sans doute, si le fait de la déchéance n'était survenu, la raison de l'homme serait plus lucide, son libre arbitre moins chancelant, ses passions charnelles moins impérieu- ses. La philosophie qui a pour domaine celle nature (elle que le premier péché l'a faite, la considère avec ses défail- lances el ses imperfections. En observant bien, sans s'élever jusqu'à la notion surna- turelle, elle est capable de signaler des traces et des témoi- gnages du grand arrêt divin. De môme aussi, avec la règle idéale qu'elle possède, elle peut en quelque sorte mesurer les abaissements de celle nature, el tracer le plan sur lequel elle s'avance vers son rétablissement, car elle y retrouve au sein même de ses défaillances, les éléments que la sagesse divine a voulu y laisser, le rayon qui révèle le ciel à la terre, l'infini au fini, l'ordre moral aux appétils personnels. Et quant à la grâce, si l'observation philosophique ne la voit pas dans sa source, elle en reconnaît les effets dans no- tre nature qu'elle répare en s'y incorporant. *