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                   ÉTUDE SUR BLMSE PASCAL.                      275

monde, et se retira dans la solitude pour y vivre désormais dans
une crainte salutaire de Dieu et de sa justice.
   Ce fut à cette époque qu'il fit connaissance avec les illustres
habitants de Port-Royal. Tout en eux était fait pour l'attirer ;
ils réunissaient le savoir, le talent, la renommée, l'autorité, la
sainteté ; ils comptaient pour maîtres ou pour disciples les
Arnaud, les d'Andilly, les Pomponne, les Nicole, les de Sacy, les
Singlin, les Sainte-Beuve, les le Maitre, les Manillon, les Boileau,
les Racine, les ducs de Luynes et de Liancourt, la duchesse de
Montpensier, les évêques deXMlons et de Seez, des princesses,
des prélats, des grands seigneurs, des grands hommes. Avec
Arnaud, Port-Royal avait créé la logique et la grammaire ; avec
Nicole, la morale du temps ; avec le Maitre il dominait le barreau,
avec Pomponne il influait sur les négociations ; avec de Sacy il
fixait le sens de la Bible ; avec Lancelot il réformait l'enseigne-
ment ; avec Boileau et Racine il perfectionnait la poésie.
   Leurs principes étaient sévères, leurs mœurs austères ; sans
être liés par des vœux monastiques, ils vivaient en religieux.
Leur piété était une piété docte et profonde, ornée de littérature
et fortifiée de toute la science théologique. Ils avaient même en
théologie des opinions propres qui leur donnaient le caractère
d'une école philosophique, et montraient dans leurs écrits un
mélange de religion et d'indépendance, de hardiesse et de mesure,
qui distingua tout le XVIIe siècle, et qu'ils contribuèrent forte-
ment à propager. Ils y possédaient tout ce qui pouvait plaire à
un néophyte comme Pascal, savant, penseur et indépendant.
Aussi se lia-t-il promptement avec les habitants de Port-Royal ;
il allait auprès d'eux s'instruire dans la religion et se fortifier
dans la vertu ; il conversait avec ses amis des choses divines,
il discutait avec eux les dogmes sacrés, et ces savants solitaires
étaient tout étonnés et tout ravis de retrouver dans la bouche de
ce jeune homme les opinions de saint Augustin, que Pascal
n'avait jamais lu. La piété le conduisit à la morale et à la théo-
logie qui, à leur tour, le menèrent à la philosophie. Ce fut à cette
époque que cet esprit qui avait besoin de produire, détournant
son activité sur les matières religieuses, conçut le plan d'un grand