page suivante »
DE N.-D. DE FOURVIÈRE. 169 s'exagèrent en raison directe des proportions qu'on lui donne dans l'œuvre, el alors l'œil du maître devient indispensable. » Est-il vrai que , comme idée , cette statue représente le mystère de l'Im- maculée Conception ? Ou serait peut-élre embarrassé pour le démontrer. L'idée de l'Immaculée Conception est une idée toute intérieure , toute mys- térieuse ; s'il était possible de la formuler, ce ne serait que par une attitude recueillie , et , à ce titre, la vierge de M. Bonnassieux , qu'on admire dans l'église d'Ainay, en serait la réalisation. L'image de Fourvière, au contraire, nous offre l'expression de la bienveillance , de la protection ; on peut lui appliquer ce que disait le Sauveur : Laissez venir ù moi les petits enfants. Nous ne sommes pas les seuls à regretter qu'on n'ait point songé à représenter la Vierge sainte tenant l'Enfant-Dieu, et lui montrant la ville ; c'eût été mieux compris et bien plus typique. Les détails de la composition auraient permis de faire une œuvre moins maigre et moins sèche , quelque chose de plus étoffé. Au reste, à la manière dont la question du concours avait été posée, on ne pouvait pas attendre mieux. La question aurait été comprise, si on eût dit aux artistes : Voilà quelle pensée vous avez à rendre ; voire œuvre doit être monumentale ; de plus , elle sera placée sur la colline et dominera la ville. Le champ s'ouvrait alors à l'imagination, l'art devenait créateur : au lieu de cela on a imposé une forme , une attitude qu'il fallait absolument reproduire ; o» a désigné héraldiquement telle couronne; dès-lors , le talent a été enchaîné , et le concours est devenu illusoire. Tout au rebours de la statue , le clocher présente des détails dont nous sommes loin de contester le mérite, mais il pèche par l'ensemble. Ses profils sont heurtés et brisés ; c'est un mélange de styles architectoniques nés sous différents climats ; c'est, en un mot, le desinil in piscem. Nous sommes désolés de le dire, mais notre silence n'empêcherait pas la vérité de sauter aux yeux. PeUt-on justifier les proportions de cet édifice? A-t-il quelques rapports avec l'église? Forme-t-il, avec les contours si gracieux de la colline, un tout har- monieux? Les anciens, nos maîtres dans l'art de bâtir, savaient que la pers- pective aérienne exagère la maigreur des profils, surtout dans les monuments destinés à être vus de loin el sur une hauteur ; dans ce cas-là , ils exagéraient à leur tour la largeur et (a majesté des formes. Nous demanderons ce que signifient ces angles taillés en biseau et rabattns au-dessus du premier étage, à la suite d'une base quadrangulaire ? Si l'on voulait y mettre des figures héraldiques , pourquoi ces blasons ont-ils été placés immédiatement au-des- sous de la corniche , et non au centre de l'espace vide qu'ils devaient dissi- muler ? Pourquoi les avoir Fait dans des proportions tellement mesquines, qu'on dirait des coquilles collées au chapeau d'un pèlerin de St Jacques ?