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LES TOURISTES A ROME. 43 toute celte manœvre avec une désinvolture si naturelle que j'attribuai cette irrévérence autant à l'ignorance qu'à l'habi- tude de ne pas se gêner , chez des gens pour lesquels on a , par suite des préjugés de l'éducation, le plus profond mépris. Cependant, cet autel de Saint-Jean-de-Latran est saint entre tous les autres. On y a encastré celui dont la tradition attribue l'usage à saint Pierre ; le pape a seul le droit d'y célébrer la messe , et le tabernacle qui le recouvre est sanctifié par les chefs de saint Pierre et saint Paul. Ce sont ces mêmes Anglais qui viennent à Rome exprès pour prendre part au carnaval, et qui mettent à cet acte autant de conscience qu'un bon catholique à recevoir la bénédiction papale. Je me rappelle avoir fait la route de Civita-Vecchia a Rome, en 1847, avec un jeune Anglais, grand, gros, frais, à figure riante et ne disant pas un mot d'italien ni de français. Deux jours après le carnaval commença. Je rencontrai mon compagnon de voyage en calèche, avec plusieurs de ses com- patriotes , ayant la tenue obligée en pareille circonstance , chapeau gris, blouse grise , et masque en toile métallique , pour se préserver des taches causées par les petits projectiles de farine ou de plâtre, auxquels on donne le nom de confetti, et s'appliquant, autant que possible, à bien remplir leur rôle. Une fois le carnaval passé, je ne revis plus mon jeune homme. Je remarquai un assez grand nombre de voilures chargées d'Anglais, et, je le dis à l'honneur de notre pays , on ne voit pas les Français prendre une part bien marquée à ces stupides divertissements ; du moins ils ne sont pas réunis par bandes et, par conséquent, leur présence'est moins ostensible que celle de nos voisins d'Outre-Manche. L'Anglais apporte beaucoup de conscience dans tout ce qu'il fait. Il vient à Rome pour voir, et certes il ne quitte pas le pays sans avoir tout vu. Il sort le matin , armé d'un Guide de l'étranger et d'un cicérone. Il met tout ce bagage dans sa