page suivante »
«'i88 ÉTUDE SUR L'HISTORIEN GIBBON. en Angleterre .- c'est le grand style de l'histoire. On pourrait toutefois lui reprocher d'être souvent épigrammatique, de man- quer de simplicité, en visant à l'effet. Ici, nous retrouvons le causeur, l'écrivain ; ses phrases sont parées et s'avancent en cé- rémonie, elles n'ont ni assez d'originalité ni assez d'abandon ; mais, en revanche, l'expression est toujours énergique, forte, colorée; les descriptions sont animées, les narrations marchent rapidement . Nous croyons, au reste, devoir avertir les lecteurs que l'on jugerait mal l'Histoire de la décadence et de la chute de l'Em- pire romain, si on la jugeait sur la traduction française ; elle fait tort au teste original ; non seulement elle ne le rend pas, elle le travestit encore et le décolore. Cette version avait été donnée par Leclerc de Septchènes, Meunier et Cantwel. Elle était •* défectueuse, même pour le sens. Depuis, M. Guizot s'est an- noncé comme ayant revu la version. A s'en tenir au titre du livre, l'œuvre de quelque main quelle vienne, car on ne daigne nommer personne, aurait été complètement refondue ; il n'en est rien pourtant ; peu d'erreurs ont disparu, et l'on n'y trouve de neuf que quelques notes insignifiantes , des erreurs d'un autre genre et beaucoup de fautes d'impression. Il faut lire Gibbon dans sa propre langue. Après avoir sincèrement rendu hommage au mérite réel de Gibbon, nous devons entrer dans un autre ordre de considéra- tions. Pourquoi Y Histoire de la décadence et de la chute de l'Em- pire romain, malgré la richesse du fond, l'incontestable supério- rité de la forme, est-elle un mauvais livre ? Ah ! c'est que l'auteur y est malheureusement inspiré par le funeste esprit de son siè- cle ! c'est qu'au lieu d'y servir les intérêts de la vérité, il y sa- crifie aux progrès d'une philosophie incroyante et haineuse .' De là , nous pouvons le dire, les grands défauts de l'œuvre de Gibbon. U n'est peut-être pas d'écrivain qui ait manifesté plus d'injustice que lui envers le Christianisme. Sa manière d'en envisager l'existence au milieu du monde romain a révolté et révolte encore toutes les âmes religieuses. Selon notre historien,