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378                  ÉTUDE SUR L'HISTORIEN GIBBON.
comme à partir de cette époque, Gibbon cessa d'être protestant
aussi bien que catholique, nous trouvons plus naturel de dire
qu'il fut bien aise de saisir l'occasion de s'affranchir de toute
entrave religieuse, et de cacher sous le dépouillement d'une su-
perstition prétendue, son adhésion réelle à la secte philosophique.
Un homme qui a osé écrire depuis, « qu'il regardait l'Eglise
chrétienne comme une innovation et qu'il était attaché à l'ancien
établissement du Paganisme (1), » devait fort peu se soucier de
redevenir protestant, après avoir été catholique. Gibbon lui-même
confirme cette induction quand, pour se justifier du reproche d'in-
constance que cette transition répétée d'une église à une autre
lui avait attiré, il cite l'exemple de Chillingworth et de Bayle
 « qui, de la superstition, dit-il, se sont élevés ensuite au scepti-
 cisme (2). » Ainsi, pour Gibbon, protestantisme et catholicisme
 n'étaient qu'un égal repaire de superstitions; tout système reli-
 gieux devait être nécessairement une erreur, et l'état suprême où
 devait tendre la raison humaine, où elle devait se reposer flère
 d'elle-même et de ses progrès, c'était l'incrédulité absolue ou le
 scepticisme.
   La rétractation de la doctrine catholique M le terme des recher-
ches théologiques de Gibbon ; il acheva alors ses études, puis il
se livra tout entier aux travaux d'érudition, vers lesquels son
génie l'avait d'abord poussé et où une avide curiosité le rappe-
lait. Dans le principe, il ne se proposa d'autre but que celui d'u-
tiliser ses études. On a imprimé, à la suite de ses Mémoires, une
partie du journal de ses lectures, sous le titre (['Extraits raison-
nés. Il commence au 27 août 1763 et finit au 16 juillet 1764.
Cette méthode d'enregistrer jour par jour les richesses intellec-
tuelles qu'on acquiert nous donne le secret de cette immense va-
riété de connaissances auxquelles Gibbon est parvenu ; elle nous
apprend aussi le moyen de faire concourir des lectures éparses à
 un but général, lorsqu'on ne s'en propose aucun en particulier.
Gibbon n'est pourtant pas l'inventeur de ce système, Photius

      (1) Lettre à Lord SlieflielJ.
      (2) Mémoires, page 6".