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                        RÉTIF DE LA BRETONNE.                                523
  ' Les femmes, comme on a pu déjà le voir, ont joué un grand rôle dans la
vie de Rétif; lui-même, à ce que nous assure M. Gérard de Nerval, se pré-
tendait l'homme le plus electrisé de son siècle; s'il ne savait pas résister à la
vision d'un petit pied bien chaussé, il ne croyait pas non plus que son nez
aquitain, son visage < la romaine, ses beaux yeux pussent rencontrer des indif-
                      J
férentes. En maint endroit, Rétif vante sa beauté corporelle le plus naïvement
du monde, il prend plaisir à se dépeindre. Sur la fin de ses jours, il s'ima-
ginait voir dans toute jeune femme un de ses rejetons, nés des fautes de sa
jeunesse, et ses convoitises se compliquaient alors de scrupules faciles à
concevoir. Quoiqu'il en soit, si ce Joconde-philosophe a consacré aux
femmes les trois quarts de ses innombrables pages, nul n'a été , envers elles,
plus sévère et plus dur que lui dans ses règlements: il est, à leur égard,
d'une cruauté draconienne qui dépasse tout ce que l'antiquité nous a laissé
de plus impitoyable dans les législations. A supposer que le proverbe,
 Comme on connaît tes Saints, on les honore, soit vrai, il faudrait avouer que,
malgré toutes ses bonnes fortunes, Rétif avait gardé rancune aux femmes et
reconnu, lui aussi, à l'exemple des Orientaux et de certains pères de l'Eglise,
qu'elles sont d'une nature inférieure, vas infirmius. Il a déposé, à ce sujet,
 ses idées dans un livre intitulé les Gynographes ou projet de règlement pro-
posé à toute l'Europe pour mettre les femmes à leur place et opérer le bon-
heur des deux sexes.
   Uattendu de son projet vaut la peine d'être cité :
   « Attendu, vu le désordre et l'espèce d'anarchie qui régnent de nos jours
dans la société civile,qu'il serait à désirer que les nations européennes pussent
trouver des moyens efficaces pour remettre l'harmonie au sein des familles, en
rendant à ceux qui en sont les chefs naturels l'autorité qu'ils ont laissée usur-
per au second sexe , entre les mains duquel elle est si visiblement déplacée,
que cette usurpation fait également le malheur des hommes et des femmes. »
   La subordination de la femme, sa servitude ou ce qu'il appelle dans son
jargon la gamaicfiie, voilà son but, son idée fixe. Ne lui parlez pas de galan-
terie; elle a tout perdu, indemali labes. Sous ce rappOTt, le siècle de Louis XIV
est, à ses yeux, un siècle de décadence. Appelez , devant lui, une femme
Mme la maréchale, Mme la présidente, cela lui semble une flatterie qui dé-
grade l'homme.
   Voici comment débute son règlement :
   « Les filles seront emmaillotées au berceau, parce que leurs mouvements
doivent être contraints; les garçons ne le seront pas. Ne caressez jamais les
petits garçons, caressez, au contraire, les petites filles. Il est bon, dit-il,
d'énerver un peu leur caractère, les caresses y aideront.