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512                    DES PREMIERS SIÈCLES
toujours, pour une large part, l'indépendance de son gouverne-
ment en tant qu'Eglise, en tant que société distincte et chargée
des intérêts spirituels, elle pouvait, le danger passé, lutter avec
énergie contre le désordre, et relever la première, à un jour
donné, le drapeau de l'autorité et de la loi.
     Nous voyons de bonne heure les conciles nationaux s'emparer
 d'une partie du gouvernement. Ce sont eux qui, par les trêves
 de Dieu, arrêtent les violences, combattent les guerres privées et
 rétablissent l'ordre intérieur. Bientôt sortent de l'abbaye de Cluny
 les moines réformateurs qui s'emparent de la cour de Rome
 et la poussent dans cette grande entreprise d'arracher l'Eglise
 aux influences féodales pour lui rendre sa pureté et sa force.
 Grégoire VII est l'inflexible exécuteur de cette politique contre
 laquelle l'Europe entière semblait liguée. Il force F Eglise à laver
 la souillure que le mélange des attributions temporelles avec les
 spirituelles lui a fait contracter. Il la régénère, et il en fait l'ins-
 trument de la régénération du reste de la société. En ceci, il est
 le continuateur de Charlemagne. Ce sont les mêmes lois, les mê-
 mes actes, c'est l'emploi des mêmes moyens. Innover est chose
  rare ; les grands hommes même se modèlent sur leurs devanciers;
  ils agissent moins sur leur siècle par la nouveauté de leurs actes
  que parce qu'ils renouent la chaîne des traditions, seules guides
  des sociétés dans leur retour vers le progrès dont elles ont perdu
  la trace. Charlemagne avait renouvelé et agrandi l'œuvre des
  Romains ; Grégoire VII recommence l'œuvre de Charlemagne et
  l'agrandit à son tour. Sans armée, sans appui matériel, il l'em-
  porte par la seule force du droit, et oblige la société féodale à
   se courber dans la personne de ses chefs devant la puissance es-
  sentiellement civilisatrice , devant cet invincible roseau qui plie
   à chaque tempête, mais pour se relever toujours.
   Je rappelle ici ces grands traits du gouvernement de Grégoire
 VII, parce que nul homme n'a imprimé à la société du moyen-
 âge une direction plus puissante. Avec lui, l'unité du gou-
 vernement ecclésiastique est rétablie, plus forte que jamais, et
 ses liens ne se briseront plus. L'Eglise, régénérée moralement,
 retrouve sa fécondité intellectuelle, et de ses écoles redevenues