page suivante »
DE L'HISTOIRE DE FRANCE. 513 célèbres on reverra sortir des grands hommes. Elle ne tarde pas à communiquer le mouvement qu'elle éprouve à la société tout entière; elle discipline la force "brutale, elle dirige son emploi. Elle offre un but à l'activité guerrière et aventureuse des sei- gneurs, elle prêche la Croisade, et la spontanéité, l'enthousiasme de cette immense entreprise est la preuve la plus manifeste de sa puissance. La Croisade est sans contredit le plus grand événement du moyen-âge. La France si longtemps envahie commence à son tour à rayonner autour d'elle ; son influence, sa langue, sa che- valerie se répandent déjà dans une partie de l'Europe. Les Nor- mands avaient fondé deux royaumes français en Italie et en Angleterre. Le royaume de Jérusalem fut Français également. Des Français reportèrent la civilisation chrétienne au berceau môme du Christianisme. Rappelons, à ce sujet, qu'à l'exception d'un seul, le Cid, tous les héros du XIe siècle, les Robert Guiscard, les Gtiillaume-le-Conquérant, les Godefroy de Bouillon appar- tiennent à la France. Les Français étaient à la tête de l'Europe lati- ne ; nos chroniqueurs des Croisades racontent même que si la vue de Constantinople et de ses merveilles les frappa d'étonnement, les institutions de l'empire grec leur parurent misérables et bien inférieures à celles des états de l'Occident, Ainsi la civilisation française, au moment où il semble que la féodalité l'ait jetée au vent, reparaît avec une vie nouvelle et une force irrésistible. C'est au XIIe siècle surtout que l'histoire nous manifeste ces grands résultats. L'Eglise n'a pas plutôt repris sa puissance que la royauté revendique la sienne avec Suger, avec Louis le Gros, , Elle reparaît comme un grand pouvoir public ; elle maintient l'or- dre et punit ceux qui le violent ; elle fait respecter son droit par les seigneurs. On a dit avec raison qu'elle était alors comme une grande magistrature. Ce n'est pas encore le temps de la forma- tion de ces puissants tribunaux politiques qui ruineront la féo- dalité, mais l'intervention ecclésiastique et le pouvoir royal sup- pléent déjà par des règles certaines à la malheureuse absence des institutions judiciaires. On ne saurait trop se pénétrer de cette idée. Là est la véritable clef de toute la politique du XIIe 33