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DE M. FLEURY RICHARD. 251 tournai à Lyon pour faire part à ma mère de tout ce qui m'arri- vait d'heureux, afin de la distraire de la mort de mon père que j'avais perdu l'année précédente. Ce fut à cette époque que M. de Sathonay, maire de Lyon, voulant me fixer dans cette ville, me donna un atelier dans le Palais-des-Arts. Je fis, en 1809, un voyage dans le Dauphiné, pour voir le château Bayart. J'en rapportai une étude de la chambre de la mère du preux chevalier et de la fenêtre par laquelle elle reçut les adieux de son fils, lors- qu'il prit le parti des armes. Cette étude ne parut pas au Salon, ayant été enlevée par un marchand, au prix de cinq mille francs. Mais, à mon retour à Lyon, j'imaginai de peindre le chevalier Bayart se disposant à paraître au tournoi du sire de Vaudray, en faisant bénir ses armes par son oncle qui était abbé d'Ainay. Ce tableau, quoiqu'un peu faible d'effet, mais dont la «imposi- tion et le bon style des figures furent" appréciés, fut payé douze mille francs par l'Impératrice. Sa Majesté acquit aussi Gabrielle d'Estrée et Henri IV. J'avais encore, à cette Exposition de 1810, un sujet de GilBlas chez le chanoine Sedillo, dont jefishommage à la reine Hortense, qui m'en témoigna noblement sa satisfaction. A la Restauration de 1814, Monsieur, comte d'Artois, passant à Lyon, je fus prévenu par M. le maire que Son Altesse Royale visiterait mon atelier. Sans doute, j'avais été reçu naguère par une impératrice, dont la grâce bienveillante m'avait bientôt en- hardi auprès d'elle ; mais je me sentais intimidé par un prince du sang royal, un petit-fils de Henri IV !.. Cependant je cherchai à conserver mon sang-froid habituel. Son Altesse vint chez moi accompagnée de Messieurs les ducs de Noaille, de Fitzjam et quel- ques autres (1). Après m'avoir adressé des compliments flatteurs, le prince s'étant arrêté devant une gravure du Serment des Ho- races, placée d'une manière assez apparente, me demanda, avec un regard scrutateur, de qui j'étais élève ? de David, lui répon- dis-je ; mais voyant que Son Altesse fronçait le sourcil, Mon- seigneur, repris-je vivement, il ne m'a enseigné que la peinture ! (i) Ce fut alors que le duc de Noaille dit, en s'adressant au prince, Richard a servi votre cause avec ses pinceaux comme nous avec notre épée.