Revue du Lyonnais » série 2 - n°3 ( 1851 ) » pp.185

                     LA COUSINE BRIDGET.                       185
   — Le visage de Bridget devenait de plus en plus sévère, à me-
sure que la jeune fille continuait à sanglotter, et une parole de
colère allait tomber de ses lèvres, quand Minna l'arrêta en disant :
   — Maintenant, Janey, écoutez-moi. Allez seule et de suite vers
votre mère ; dites-lui que Peggy est auprès de moi et que je
la ramènerai dans un instant. Allez, à présent, sans une pa-
role de plus.
   Et, ouvrant la porte, elle la renvoya sans autre cérémonie.
   Alors elle se mit à parler avec rapidité à Bridget qui con-
servait toute sa rigidité de visage et paraissait désireuse de par-
ler à son tour. Peggy, de son côté, continuait de pleurer. Minna
babillait tellement qu'elle parvint à empêcher sa cousine d'ouvrir -
la bouche. Elle lui enleva les vêtements qu'elle avait pris pour
sortir, l'assit dans son fauteuil, lui donna son tabouret de pieds,
et se tournant ensuite avec douceur vers Peggy, lui dit :
   — Venez, Peggy ; aidez-moi à monter ces objets au haut de
l'escalier.
   Et, ayant jeté un châle sur le bras de la jeune fille, elle sor-
tit avec elle de l'appartement.
   Ce fut dans sa propre chambre, sa gentille petite chambre,
que Minna conduisit sa compagne éplorée. Elle lui enleva son
bonnet, attira sa tête sur son épaule, lissa de la main ses longs
chevenx blonds, essuya les larmes sur ses joues avec son pro-
pre mouchoir, et la caressa comme ferait une mère pour son
enfant qui souffre. — Et belles apparaissaient-elles ainsi toutes
deux. Peggy avec sa jolie, triste et rougissante figure appuyée
contre le visage gracieux de Minna; les cheveux blonds de l'une
mêlés aux sombres tresses de l'autre et la main brunie, mais
bien formée de la villageoise posée sur la main, plus blanche
encore par le contraste, de la jeune lady.
   Pendant quelques moments, elles gardèrent un silence que
troublaient seuls les soupirs de Peggy. Enfin, celle-ci le rompit
en disant :
   — Je sais, je sais qu'il voulait m'épouser, et j'aurais été une
belle dame, c'est certain, si Madame Mac-Tavish n'avait pas....
   — Chut! chut! Peggy ! d'après ce que je vois, vous avez con-