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 386                    DE L'UNITÉ DES ARTS.
     Ces erreurs devaient fatalement sortir, à notre époque, du
  sentiment encore trop irréfléchi de l'unité de tous les arts dans
  la notion d'art en général. Au milieu de tous les excès de l'a-
  nalyse et du morcellement, ce principe, oublié depuis le moyen
  âge, a recommencé à prévaloir dans la philosophie de notre
 temps ; mais il n'a encore été suffisamment étudié ni dans la
  raison ni dans l'histoire. L'unité exclut la confusion. La juste
 idée d'une communauté générale de but et de principe entre les
  arts comporte celle de la diversité de leurs moyens. En étu-
  diant les points par lesquels ils se touchent, on apprend à con-
  naître les limites par lesquelles ils se circonscrivent.
     Essayer d'établir l'unité d'origine et la filiation des arts, cher-
 cher pour eux tous une base commune dans la notion ration-
 nelle de l'art en général, travailler à leur rapprochement dans
 une même harmonie et vers un but pareil, ce n'est donc point
 favoriser cette confusion de moyens dissemblables, qui a gâté
 les fruits du noble effort des poètes et des artistes de notre
 temps ; c'est, au contraire, lutter contre toute confusion. Le
 désordre actuel est issu de deux causes opposées : le sentiment
 encore aveugle de l'unité des arts ; le morcellement excessif des
 genres au milieu duquel cette idée d'unité mal raisonnée est
 brusquement intervenue. L'histoire comparée de la poésie, de
la peinture, de l'architecture, de la musique, en montrant com-
 ment les arts ont été unis autrefois dans un même faisceau et
 comment ils se sont séparés, expliquera la loi de formation de
 chacune des branches distinctes de l'art, et prouvera sa légiti-
mité, c'est-à-dire son droit d'avoir une existence à part. Mais, en
même temps, cette histoire rattachera chaque branche au tronc
primordial ; elle fera aussi justice des superfétations parasites
que Von a voulu enter sur les rameaux légitimes. Circonscrire
nettement les limites des arts, en les ramenant tous à un même
centre, tel est pour la critique le moyen le plus efficace de com-
battre la décadence, déjà si ancienne parmi nous, de tout ce qui
tient à la manifestation du beau.
   Ce n'est pas en prenant pour base la situation actuelle des
arts qu'on peut s'élever à de légitimes théories. Les faits pré-