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SUR L'ABBÉ BONNEVIE. 327 firmités. Ses amis commençaient à s'en apercevoir : madame de Chateaubriand lui écrivait le 11 juillet 1840 : Vous dites donc, mon très-cher chanoine, que je ne vous écris ni ne vous réponds; heureusement que vous avez eu la bonté, ou plutôt la méchanceté de lire quelques lignes de ma dernière lettre à Mgr. l'évéque de Gap ; au- trement, je m'en prendrais à la poste Le voyage d'Italie est manqué. Nous ne voyageons plus qu'en projets ; nous devenons paresseux, et nous ne nous aimons plus que là où il nous reste encore quelques amis. Le nombre, mon bon abbé, en est bien diminué. Le vieux Clausel est allé planter des arbres qu'il ne verra pas croître. Mais il avait la passion de mourir dans son castel où il sera enterré en seigneur de paroisse ; les paysans, grâce à leur ignorance, étant restés sauvages au point de faire plus de cas d'un boisseau de pommes de terre que de la sainte égalité. Ce qui me fait fort regretter de ne pas aller à Home, c'est que cela nous empêche d'aller à Lyon. Nous nous faisions une si grande fête de vous revoir et d'aller manger l'excellent potage de Berthe. Vous ne me parlez pas de cette bonne fille, il paraît qu'elle est devenue tout-à -fait infirme ; c'est un vrai cha- grin pour vous et pour elle qui, j'en suis sûre, plaint moins son mal que le malheur de ne plus pouvoir vous soigner et vous gronder à son gré. Diles-lui, je vous prie, que je veux la trouver gaie et gaillarde comme jadis, quand nous irons cette année ou l'année prochaine lui demander à diner... Adieu, notre vieil ami, vous savez que personne ne vous est aussi tendre- ment et aussi sincèrement attaché que nous. Vous savez aussi que ;'<; vous écris et que vos reproches sont injustes. Le io janvier 1841. Très-cher abbé , où avez-vous pris que nous avions traversé Lyon sans mot dire ? Le Rhône, qui n'a déjà que trop cheminé, arriverait à Paris, avant qu'il nous arrivât de saluer la tour de Saint-Jean sans aller vous embrasser. Nous n'avons pas quitté la rue du Bac. C'est notre beau neveu Louis qui est allé voir son frère à Turin, et qui, à son retour, vous aura brûlé , voulant arriver à temps, pour voir Paris réduit en cendre, selon la prophétie à l'usage des roya- listes (pur-sang). Heureusement, nous n'avons eu d'autres cendres que celles de Napoléon, qui n'étaient rien moins que chaudes en s'en allant au dernier gile, par un froid de dix degrés. Nous faisons toujours des projets de départ pour le printemps. Nous pensons à Rome ; mais la ville aux merveilles n'est pas merveilleuse pour s'y établir à demeure , ne pouvant, qu'à prix de ce qui nous manque , beaucoup d'argent, se procurer les aisances de la vie auxquelles les ans nous ont accoutumé, c'est-à -dire un bon lit, un diner passable et un appartement