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328 NOTICE BIOGRAPHIQUE tant soit peu confortable. Rien de moins poétique que tout cela ; mais si à DOS âges on peut encore admirer le (,'olisée, on veut aussi trouver son lit un peu moins dur que les briques de cette illustre ruine... Nous avons ici un horrible froid; l'hiver n'est pas ordinairement aussi co- saque, mais il aura voulu se mettre à la mode. Adieu, très-cher abbé, M. de Chateaubriand et moi nous vous aimons, comme de coutume, de toute la sincérité de notre cœur. L'abbé Bonnevie commençait donc à perdre la mémoire, son esprit perdait aussi de sa vivacité , de cet entrain plein de gaîté, qui le faisait appeler, par M. de Chateaubriand : le joyeux abbé, et qu'il portait dans toutes les sociétés où sa présence avait été si longtemps recherchée. Peu à peu , ses pas errants dans la ville étaient obligés d'être accompagnés d'une domesti- que. Il allait souvent s'enquérir des nouvelles de tel ou tel ami que la mort avait frappé depuis des années. Tantôt il faisait des préparatifs pour aller prêcher, disait-il, à Montpellier , à Toulouse, ou à Paris ; tantôt, à six ou sept heures du soir, il annonçait qu'il allait célébrer le saint sacrifice de la messe. Le vénérable chanoine devenait un enfant. Triste pronostic qui pré- sageait une fin prochaine. Mais, toujours charitable, il aimait à soulager les pauvres qui ne s'adressaient jamais en vain à la sensibilité de son cœur. Un ami lui resta fidèle, et cet ami s'en- quérait de ses besoins, soignait sa vieillesse, cherchait à soula- ger ses infirmités; c'était comme un fils plein de tendresse qui veillait sur les jours d'un père bien-aimé. Celui qui avait pré- levé sur sa modeste existence, dans les temps malheureux de l'émigration française, pour venir au secours de son archevêque exilé comme lui ; celui qui, pendant les jours de la prospérité , n'avait pas calculé avec les pauvres pour lesquels il éprouvait une compassion sincère ; celui qui, si souvent, avait cherché à exciter la charité du riche en faveur des malheureux , serait mort sur un. grabat, si l'illustre cardinal de Bonald, qui l'aimait et l'estimait, ne fût venu au secours du vénérable doyen avec une noble générosité. L'abbé Bonnevie n'avait rien économisé pendant sa vie. Les pauvres étaient le seul trésor dans lequel il eût renfermé soigneusement ses épargnes ; il n'attendait sa