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LE MONT-D'OR EN 1849. :il Le 10 mars 1848 parut, dans le même numéro de cet inflexi • Me Moniteur, l'arrêté qui réhabilitait la mémoire du maréchal Ney. Vous ne voyez probablement pas encore quelle bizarre analo- gie, quelle singulière concordance existe entre les deux arrêtés. Je vais vous le dire, moi, en dépit du docteur Bertrand qui n'a jamais voulu donner de la publicité à ce fait. M. le docteur L***, le même que M. Altaroche envoyait d'un trait de plume occuper le poste de M. Bertrand, s'était vanté, dans un mémoire publié et adressé en 1817 au roi Louis XVFH, d'avoir été un des premiers à concourir à l'arrestation du maréchal Ney. Singulière coïncidence ! bizarre effet du sort que ces deux arrê- tés paraissant le même jour comme pour infliger une leçon de plus aux ambitions et aux vanités humaines. Le docteur L***, sous son inspection de quelques mois, vit se tarir les bienfaisantes sources, se diminuer la fortune du pays. Les eaux furent délaissées , et malades et habitants réclamèrent bien vite leur cher docteur. Aussi, cette année, la foule des bai- gneurs et des buveurs d'eau est-elle revenue fidèle et empressée autour de son médecin de prédilection. L'expérience et le talent ne se remplacent pas si facilement. M. le docteur Bertrand a subi les atteintes des années, mais le temps n'a eu de prise ni sur son intelligence ni sur ses facul- tés. Son front, c'est le front des hommes de Plutarque, son coup- d'œil, le coup-d'œil inquisiteur et sûr du praticien exercé ; sa phrase est concise, imagée, saisissante, pittoresque; son allure est restée indépendante et franche jusqu'à la brusquerie. Tout ce qu'il dit se grave dans la mémoire, comme ses traits, comme sou regard. Il est, par la conformation de sa tête, de cette race d'hommes qui s'appellent Lordat, Dupuytren, Cuvier, etc. Vous êtes ici à 1,046 mètres au-dessus du niveau de la mer, au pied du pic le plus élevé de France, le pic de Sancy, qui se glo- rifie de 1887 mètres d'élévation. Vous êtes dans la région des nuages, dans la patrie des aigles, au milieu d'une gorge formée par les plus hautes montagnes, encore assombries par le noir feuillage des forêts de sapins séculaires.