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                    ROME AV SIÈCLE D'AUGUSTE.                  1^5
 de faire leur barbe , de peur d'être devancés. « Ont-ils par
 hasard dormi quelques instants de plus que de coutume, le
jour cornmence-t-il à poindre; ils se réveillent en sursaut,
 et les voilà courant au milieu de la boue du matin , à moitié
 chaussés, et vôtusà cru de la loge de rigueur. » Quand ils ont
 ainsi bravé la bise , enduré la pluie ou la neige, ils ont à
 souffrir les dédains et l'insolence des esclaves, la vénalité du
cubiculaire (1), enfin , admis à grand'peine , les clients vont
se trouver en présence de leur patron. Us vont être dédom-
 magés de leur dévoûment servile par l'affabilité du maître.
 Il se montre , mais c'est pour accabler les malheureux visi-
teurs de sa politesse outrageante ; ou bien, les laissant se mor-
fondre dans son vestibule, il s'échappe par une issue secrète.
Et quel est le prix d'une vie aussi humiliante? la sportule,
panier de vivres assez médiocres, que chaque jour le patron
 fait distribuer publiquement, à l'entrée de sa maison , à la
foule affamée qui en assiège la porte (2).
    Ailleurs, la narration, j'ai presque dit la satire du critique,
amène devant nous les captateurs de testament (3). Rien ne
peut exciter tour à tour le rire ou l'indignation autant que
la peinture de ces misérables, justement comparés à de cor-
beaux ou a des vautours à l'affût des cadavres, Il s'agissait de
nous initier aux lâchetés de leurs complaisances intéressées ,
à la théorie de ces dégradants offices auxquels s'enchaînaient des
hommes quelquefois sans bien , toujours sans vertu , dupeurs
souvent dupés , pour se faire porter sur le testament d'un
riche crédule ou calculateur. « Toutes les conditions d'une vé-
ritable servitude, ces avides clients les remplissent sans s'ef-
frayer ; point de bassesse dont l'espérance d'une succession
ne les rende capables : attentifs au moindre signe d'un vieil-
lard souvent impérieux et morose, ses caprices deviennent
aussitôt leur volonté ; ils parlent, s'il le veut, se taisent quand
il l'ordonne, se montrent assidus auprès de lui , l'accablent
de-soins et de prévenances, en un mot, n'épargnent rien
pour lui plaire. L'accompagnent-ils en public, ilsfontle com-
pagnon extérieur, c'est-à-dire qu'ils prennent le côté le plus
exposé au danger ou aux accidents. Font-ils un sacrifice, la
meilleure part appartient à ce patron : ils l'emmènent pour
participer aux entrailles des victimes , l'invitent souvent à
dîner ou â souper, et le comblent de présents ; c'est à qui

  ( O C'était, à Rome , le nom du valet de chambre.
  (2) T. i, p. 289. — (3)T. HT , p. 2 d .