page suivante »
DE LA PRIÈRE 515 notre défaillance spirituelle. Aveu du besoin, elle lui ouvre naturellement les lèvres de noire âme. Dieu, qui dans son amour n'attend que cet instant, consent avec d'ineffables dé- lices à devenir le bien de cette créature qui n'éprouve de faim que pour lui. De là , l'humilité est la source de notre gran- deur ; c'est-à -dire de notre force dans l'être. Mais cet heureux phénomène n'est pas seulement un fait ontologique, il ne se passe pas seulement dans la substance du cœur. L'intelligence ne trouve-t-elle pas aussi dans l'hu-< milité la première condition de son développement ? Celui qui s'imagine posséder la vérité ne la cherche plus ; il s'endort stupide et tranquille dans sa présomptueuse confiance. Au contraire, toute intelligence à la poursuite d'un fait, d'une idée, d'une loi, s*avoue par là même qu'elle ne possède point ce fait, celte idée, cette loi ; et comme la vérité n'entre com- plètement dans l'intelligence qu'à la suite de longs et conti- nuels travaux, la science et l'étude, par lesquelles l'homme arrive à la vérité, ne sont qu'un long et continuel acte d'hu- milité intellectuelle. Quand, par suite de l'orgueil, on croit savoir ce que l'on ne sait pas, il en résulte que non seulement on est dans l'er- reur, mais que l'on ne se met plus en peine d'en sortir : de là l'orgueil mène à l'ignorance. Quand, par suite de l'humilité, on croit ne jamais assez savoir ce que l'on sait déjà , il en ré- sulte que non seulement on est dans le vrai, mais qu'on tra- vaille encore à y pénétrer davantage : de là l'humilité mène au génie. Soil dit psychologiquement parlant, car ontologiquement le fait a lieu dans sa réalité, à cause de l'étroite relation que l'humilité établit entre l'âme et l'absolu. Mais ce phénomène ne se passe pas seulement dans le cœur et dans l'intelligence. La volonté ne trouve-t-elle pas aussi