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376 VOYAGE A VIENNE. debout à cinq heures du matin ; deux fois par semaine, il donne des audiences publiques, des audiences de huit à neuf heures, pendant lesquelles le dernier de ses sujets, un portefaix, un cocher de fiacre, peut l'aborder familière- ment et lui demander justice. Il n'est aucun monarque qui pousse à ce point la simplicité ou, pour mieux dire, la bon- homie. Au milieu de la nuit, si le feu se manifeste dans quelque quartier de Vienne, il monte à cheval et se rend en personne, malgré son grand âge, au théâtre du danger, et ne se retire que le dernier, après s'être assuré que la tran- quillité est parfaitement rétablie. Aussi le peuple de Vienne qui, dans ses jours de détresse, lui a prodigué tant de preu- ves de dévouement, lui conserve encore toute son affection. On ne pousse pas autour de lui des cris tumultueux de vive l'empereur ! mais tous les yeux s'attachent sur lui avec in- térêt ; on épie en silence les changements sinistres ou favo- rables de son visage, et une expression d'amour et de respect est empreinte sur toutes les physionomies. » De tout ce qu'on voit, de tout ce qu'on entend à Vienne, ressort invinciblement ce fait que jamais souverain n'inspira à ses sujets un attachement aussi profond, aussi sincère, aussi persistant que celui que les habitants de Vienne vouèrent à leur empereur François. On dira peut-être en sou- riant que l'Autrichien est bon et bien dressé à toute disci- pline monarchique; qu'il a toujours en réserve un grand fond d'attachement tout prêt pour les souverains que l'ordre de succession au trône lui amène. A travers l'ironie, il y a quelque vérité dans celle remarque en général; mais en ce qui concerne l'empereur François, il y a de la part des Viennois, quelque chose de moins banal et de plus significatif; il y a enfin, quoiqu'on puisse dire pour en at- ténuer le sens, une manifestation trop sérieuse, trop persévé- rante pour ne pas témoigner de la valeur morale de l'homme.