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VOYAGE A VIENNE. 293
curieux musée de gothicités, qui affecte et joue très bien
l'irrégulière et incommode demeure d'un seigneur châtelain
dans les temps féodaux. Rien n'y manque, excepté peut-être
cette teinte de vétusté que les siècles peuvent seuls donner.
En entrant dans la cour d'honneur, on se trouve tout d'abord
en plein moyen-âge. On y cherche seulement le destrier tout
sellé du châtelain parlant pour la chasse avec le faucon sur
le poing.
L'intérieur surtout renferme tous les curieux trésors des
temps chevaleresques. Il y a là des instruments de guerre et
divers objets consacrés par les plus grands noms historiques ;
mais je dois m'abstenir de toute nomenclature. Je signalerai
toutefois , en passant, un casque de Charles-Quint (grosse
tête) et des mules de Catherine de Médicis (petit pied). Il y a
là aussi un élrier de François I e r , donné, dit l'étiquette ,
par M. de Metternich. La chose et le nom du donateur
s'accordent merveilleusement : M. de Metternich est, en
effet, un de ces hommes qui tiennent l'étrier aux souverains
el quelquefois les remettent en selle.
Les salles sont pleines de meubles gothiques, de vieilles
et riches tentures, de toutes sortes d'ustensiles, qui sont
comme un commentaire de la vie princière , chevaleresque
et monacale du moyen-âge. Bien entendu qu'il n'y a rien lÃ
du serf. Les boiseries et les plafonds sont d'une beaulé sur-
prenante, ornés de sculptures, de dorures et de toutes riches
incrustations. Ces précieux plafonds en bois rares ont été
pris, pour la plupart, dans de riches couvents dont les Ordres
sont abolis. Les magnifiques panneaux d'un petit salon sont
peints par Jules Romain. Les vieux châteaux ont aussi élé
dépouillés de leurs curiosités pour Ritterbourg. J'y ai remar-
qué un clavecin vénérable, qui avait été certainement une
curiosité de grand luxe dans son temps. Le clavier a peu
d'étendue , et beaucoup de touches sont muettes pour