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M. ANGELO FRIGNANI. 149 leur dire à l'oreille. La ronde est aussitôt commencée ; à ce- lui-là une niaiserie, â cet autre une fadaise, et ainsi de suite, jusqu'à ce qu'il fût arrivé à l'oreille fraternelle. Je simule, dit-il alors, mais silence ! « Fingo, ma zitti. » Lorsque Frignani fut transféré de sa prison à l'hôpital des fous, à Faejjga, nouvelle comédie aussi amusante que plu- sieurs des premières. Il faisait marcher les soldats comme au son du tambour, et, parvenu à l'infirmerie, notre évoque improvisé donnait gracieusement sa bénédiction à tons les malades ; puis, arrivé devant un autel, il s'agenouillait et entonnait le Benedictus Dominus Deus Israël. Le forçait-on de se relever? il trouvait une réponse dans les Écritures et disait : Seigneur, je souffre violence, répondez pour moi. C'est dans l'hôpital de Faenza qu'il advint à Frignani diver- ses aventures qui sont racontées avec beaucoup de charme et de touchante simplicité. Il en est une, entre autres, qui rappelle la Zanze de Pellico, celte mélancolique Zanze dont Silvio recevait de si bon café. Quelques rieuses jeunes filles, — et il savait l'histoire de deux d'entre elles, — vinrent quelques jours folâtrer dans la cour sous sa fenêtre. Fri- gnani feignait de ne pas les apercevoir, et faisait des tours d'escamoteur. « Les jeunes filles s'étant amusées de cela un certain temps, dit M. Frignani, s'approchèrent davantage encore de la fe- nêtre, et me dirent : Qui vous a appris à escamoter ? Les regardant avec un gracieux sourire, je répondis : celui dont le savoir,est de tous le plus grand, m'enseigna les arts et les sciences qui sont, qui furent et qui seront; mais je n'en exerce que deux ici-bas, celle que vous voyez et l'astrologie. « Comment, vous savez dire la bonne aventure? « Mieux que tous ceux qui sont, qui furent et qui seront. « Voulons-nous nous la faire dire? se demandèrent-elles l'une à l'autre.