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                       VOYAGE A VIENNE.                        135

 déjà connue, dont on m'a confirmé la parfaite exactitude à
 Vienne.
    Un jour qu'il était seul avec son grand père, ce qui arrivait
souvent, le duc de Reichstadt, fort jeune alors et naïvement
questionneur (c'était bien un enfant terrible, celui- là!) dit
tout-à-coup, et comme exprimant une pensée qui faisait suite
à une pensée tacite :
    « Est-il vrai, grand papa, que, quand j'étais à Paris, j'avais
des pages?
    — Oui, je crois que vous aviez des pages.
    — Mais est-il vrai aussi qu'on m'appelait Roi de Rome?
    — Oui, il est très-vrai qu'on vous appelait Roi de Rome.
    — Et qu'est-ce que c'est que d'être Roi de Rome, grand
papa?
   —Quand vous serez plus grand, mon cher enfant, je pour-
rai mieux vous expliquer la chose; mais, en attendant, je vous
dirai dès aujourd'hui qu'à mon titre d'Empereur d'Autriche
 se joint encore celui de Roi de Jérusalem, quoique je n'aie
rien à démêler avec Jérusalem : eh bien ! vous étiez Roi de
Rome tout justement comme je suis Roi de Jérusalem. »
    Ce n'était pas trop mal répondu. L'enfant devint rêveur et
ne dit plus rien. Quelques années après, il aurait pu reprendre
ainsi la conversation :
   Oh, que non pas, grand papa ! il y a une notable différence:
c'est que si, quand je portais ce titre, tout enfant quej'étais,
je m'étais présenté à Rome, les trois cents clochers de cette
capitale auraient sonné leur plus beau carillon à mon appro-
che; le château Saint-Ange aurait brûlé son dernier grain de
poudre pour me saluer, et le sénat et le peuple m'auraient
suivi au Capitule pour rendre grâce aux Dieux, car mon père
gouvernait alors, par un de ses préfets, la ville éternelle : tandis
que pour vous, grand papa, votre royaume de Jérusalem n'est
pas de ce monde! Vous ne saunez y entrer en souverain pour