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90                ROME AU SIÈCLE D ' A D G C S T E .
déshonoré si sa toge n'était bien lustrée par le foulon. Jamais il ne
sort sans l'avoir arrangée devant un miroir, sans en avoir drapé
largement le sinus, partie croisant sur la poitrine, et chaque
soir ce précieux manteau est remis en presse pour lui conserver
des plis si savamment étudiés. Dehors, il évite avec soin le coude
importun des passants. Une fois, ayant eu la structure laborieuse
de sa toge dérangée par quelqu'un qui le heurta dans un passage
étroit, il en fut si irrité qu'il lui intenta une action d'injure. »
   Vous seriez tenté sans doute de croire, en lisant cette page, que
M. Dezobry s'est rappelé quelquefois les habitudes et les excès de
la civilisation moderne, lorsqu'il traçait la peinture des mœurs de
l'antiquité; et que, malgré lui, obéissant à une provocation bien
séduisante que lui adressait le sujet même de ses tableaux, il s'est
laissé aller au penchant de faire la satire indirecte de nos jours.
Il n'en est rien pourtant. Ses autorités le justifient assez. Que
répondre à un auteur dont les moindres mots sont appuyés sur des
citations d'Ovide, de Properce, de Catulle, de Martial ; qui appelle
à son secours Pline, Juvénal, Quintilien, Manilius, Cicéron, Aulu-
Gelle, Suétone; qui n'affirme rien sans avoir consulté Velléius Pa-
terculus, les traités de Sénèque, Horace et ses commentateurs
antiques, les Saturnales de Macrobe, ou Tertullien, ou Festus, ou
Pétrone? Que M. Dezobry entretienne son lecteur des matières
les plus frivoles en apparence, ou des plus sérieuses, il prend
partout le même soin de fournir ses preuves, et l'honnêteté de ses
travaux reluit de toutes paris. Ses lettres sur les bains, sur les re-
pas, sur les tavernes, sur la police de Rome, sur les voleurs, ont
été composées en présence des textes les plus authentiques, et
avec la même sincérité, les mêmes scrupules d'antiquaire, le même
respect de la science et du lecteur, que les lettres plus austères sur
la Constitution de la Société romaine, et sur les Formes du gou-
vernement, sur les Comices, le Droit de cité au VAdministration
de l'Italie.
   Disons-le cependant, sans craindre de nuire à la haute renommée
que le livre de M. Dezobry a partout acquise, et sur les titres les
plus légitimes, avouons-le, parce que toute œuvre humaine a son
point essentiel où l'auteur lui même paraît avoir dirigé le plus de