page suivante »
DE LA SOCIÉTÉ DES AMIS DES ARTS. 75 ordonnance ; l'attention s'éparpille sur les anges, les lions, etc., il n'en reste point pour le héros de la scène. C'est avec le plus vif plaisir que nous arrivons à parler de M. Bonirote dont les travaux persévérants sont enfui couronnés d'un plein succès. Il a fait un pas immense depuis l'année dernière ; tous ses tableaux sont dignes d'éloges, mais sa Prière du soir est un morceau vraiment r e m a r q u a b l e ; la cou- leur est tout à la fois chaude et harmonieuse, les fonds char- niants^ les figures (deux surtout, celle qui est debout et le vieillard), admirablement posées, dessinées avec soin, drapées avecgoût, e l l e s étoffes bien rendues. Pour ne pas tout louer sans restriction, nous demanderons à M. Bonirote si sgs om- bres ne sont pas un peu trop transparentes. Un peintre du siècle dernier, dont le nom nous échappe., qui comptait ses tableaux par ses succès^ disait un jour à M. de Feuquières : « Savez-vous pourquoi je ne fais pas de portraits ? c'est que c'est trop difficile. » Le portrait, c'est la vie, la beauté et l'expression de la figure humaine dans toutes ses variétés, la ressemblance poétique de l'homme sous toutes ses faces ; mais, pour la plupart des portraitistes, il semble que ce soit la plus petite et la plus facile besogne du monde, et chacun s'y met hardiment. On commence la peinture par le portrait ; aussi, à chaque Exposition, on se demande com- ment il peut se faire que tant d'honnêtes gens payent pour être ainsi défigurés et exposés au Salon. Il faudrait s'en affli ger, et l'on ne peut s'empêcher d'en rire. Il existe pourtant quelques artistes sérieux qui ne prennent le portrait ni au point de vue de la caricature,ni à celui du journal des modes. Pour ceux-là , le métier est r u d e : le laid, le grotesque qui les poursuit, que le peintre s'efforce en vain d'ennoblir ; le mauvais goût et la sottise du modèle, l'influence de la mode qui le violentent, qui lui infligent tel accessoire, telle pose, sont autant d'écueils nuisibles à sa popularité, s'il refuse de céder à d'ignorantes exigences, et dangereux pour son talent qui s'amoindrit et se dégrade, s'il les subit.