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G8 Toute la force de cette démonstration sur la nature intime de Dieu, consiste en ce qu'il ne serait pas possible que les créatures eussent reçu telles propriétés et telles perfections, et que mon cœur eût reçu les éléments des affections qui leur correspondent, si Dieu, qui en nous créant à son image nous a donné les unes et les autres, ne les possédait pas lui- même à l'infini. C'est, du reste, sur la môme argumentation que Descartes fait reposer son immortelle démonstration de l'existence de Dieu, tirée de l'idée de l'infini qui est en nous; et c'est pourquoi j'invoquais le nom de ce grand homme avant de donner cette démonstration de la nature de Dieu, tirée des sentiments d'amour qui sont également en nous. Ainsi, des êtres ont pour moi un caractère spécial et un charme particulier qui provoquent directement des senti- ments dont je trouve en mon cœur les éléments sans les y avoir mis; de sorte que ces êtres, ainsi que les charmes particuliers qu'ils ont pour moi, et mon cœur, ainsi que les affections particulières qu'il éprouve pour eux, ont été po- sitivement créés tels; et si ces êtres, avec leurs qualités spéciales, mon cœur, avec ses affections qui y correspondent, ont été créés avec de tels caractères, c'est que ces caractères se trouvent dans l'être qui les a créés. Or, ces êtres sont un père, une femme, des enfants, ces affections sont l'amour filial, l'amour conjugal, l'amour paternel ; l'être qui les a créés a donc tout à la fois le caractère du père, le caractère de l'épouse, le caractère de l'enfant, la bonté du premier, la beauté de la seconde, l'innocence du dernier. Alors mon cœur, après avoir été délicieusement formé à tous ces amours, se trouva tout prêt à aimer Celui en qui brillent tous les dons qu'il a communiqués à ces êtres déjà si chéris de nous. Ce n'est pas tout; ainsi que le dit saint Thomas : Semper causam oportet esse potiorcm causato ; ou encore comme Descaries : Rien dans un effet qui ne soit d'une plus excellente