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bonne et utile, qu'il est si criminel à l'époux de ne pas aimer
sa femme ; c'est parce que ces affections sont naturelles à
l'homme, qu'il ne lui faut pas des efforts du moi pour les
avoir, mais qu'il lui faudrait des efforts du moi pour ne pas les
avoir. Si la reconnaissance, si les trois affections de la famille
étaient dues entièrement au moi, sans qu'elles aient un
germe préexistant, au lieu d'être de rigueur dans l'homme,
elles seraient des états tout-à-fait supérieurs et rares, comme
le génie ou l'héroïsme, comme tout ce qui dépend exclusi-
vement d'un développement extraordinaire de l'individu. Mais
puisque j'éprouve ces amours antérieurement à la présence
des êtres auxquels ils doivent m'attacher, comment pourrais-je
aimer ces êtres, si je n'avais en moi des sentiments prêts pour
m'attacher à eux dès que je les rencontre ? L'air et le soleil
me sont également bons et utiles, et jamais je ne me suis
trouvé un sentiment spécial pour l'air ou pour le soleil, tandis
qu'indépendamment de tout, l'homme sent qu'il a un amour
 spécial pour être père et aimer des enfants, un amour spécial
pour être époux et aimer une femme, et ainsi de l'enfant par
rapport à son père.
   Si ces amours ne viennent ni du monde extérieur, puis-
qu'ils existent antérieurement à ses apparitions, ni du
cœur, puisqu'ils existent en lui d'une manière impersonnelle,
ils viennent donc de l'être objectif qui les met dans le cœur
 en le créant, et qui nous parle ainsi de lui par ces sentiments
et ces idées qu'il nous donne de lui-même Or, l'être objectif
d'une idée a nécessairement en réalité ce qu'il met dans nous
en idée ; l'être objectif d'une idée ne peut être moins que
celte idée, il est au contraire l'idéal et la réalité suprême de
 cette idée. Nous ne pouvons donc trouver dans le cœur l'idée
 et le sentiment de l'amour paternel, de l'amour conjugal et
 de l'amour filial, sans dire que Dieu est l'idéal et la réalité
 suprême de tous ces amours.