Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
[ Revenir aux résultats de la recherche ]
page suivante »
                                 30
démence m'obtiendra du pape la remise de ce péché qu'aucun
de vous n'a le pouvoir d'absoudre.
   — Il est vrai, noble pénitente, qu'il est des cas réservés ,
et que la profanation dont vous vous confessez serait du res-
sort de la cour de Rome si vous étiez en santé parfaite , mais
hélas ! le mal qui vous fait dépérir vous ôte la conscience du
péché et la plénitude de la grâce. Ces morsures n'indiquent
point un sacrilège dans l'état où vous êtes ; mais elles indi-
quent que vous avez une envie, un appétit....
   — Oui        c'est de chair humaine ! de chair d'enfant que
j'ai faim!.... Aumônier chapelaiu , vous pénétrez cet affreux
mystère contre lequel tous mes sens se révoltent ! s'écria la
dame de Jarez toute éperdue , puis elle ajouta : — Les fem-
mes grosses ont toutes sortes d'envies , mais celle-là est hor-
rible , contre nature ; que dois-je faire ? que vais-je devenir?
qui pourra m'absoudre ? Je suis une possédée ! Et elle tomba,
après celte confession , morte entre les mains du prêtre.
   Une femme morte et une cassette ouverte à côté d'un cada-
vre, aurait pu faire naître le soupçon d'un grand crime , mais
le chapelain étaitrevêtu d'un caractère qui le mettait au-dessus
de toute méchante pensée. Ce religieux , lui aussi dégoûté du
monde, aspirait, dans quelques sombres retraites , à faire
partie de l'ordre de St.-Bruno. L'austérité de ses mœurs et ses
vertus évangéliques lui avaient concilié tous les cœurs ; or ,
comme il était sans reproche , il se trouvait sans peur.
   Mais la châtelaine, qu'il croyait passée de cette vie dans
l'autre , respirait encore. C'en était néanmoins fait d'elle , si
l'on différait de la secourir ; et pour la secourir, il fallait tout
ébruiter, se confier aux. guérisseurs ou mires , appeler les
gens du manoir ; et dans des cas pareils , quand l'un vient
tous accourent, ne fut-ce que pour avoir à raconter.
   Le chapelain n'hésita pas. Il lui fut impossible de taire les
souffrances de la malade, puisqu'elle mourait de faim.
   La foule accourut comme il l'avait prévu, et, à force de
soins, on fit revenir la noble dame de bien bas.