page suivante »
LE SILENCE. 439 Où ne laissent aucune trace Les pas vivants qui l'ont heurté; L'hiver, cette mort éphémère, Où la nature, notre mère, Trempe son immortalité. Mais, pour que la glace se fonde, Que la plante où la sève dort, Comme une jeune mère, abonde D'ardents parfums et de fruits d'or; Pour que le sombre hiver enfante Celte floraison triomphante Qu'il recèle en ses flancs de feu, Il ne faut, du mont à la plaine, Qu'un rayon, qu'un chant, qu'une haleine, Il ne faut qu'un souffle de Dieu. Ce souffle qui, passant à travers la nature, S'imprègne des secrets de sa félicité, Arrive ainsi, comme un murmure, Jusqu'au cœur de l'humanité. Mais ce murmure, ô mon poète ! Est bien confus et bien lointain. A peine l'oreille inquiète, Croit l'avoir saisi qu'il s'éteint. Et, comme une Pythie austère Qui, dans cet écho du mystère, Crut entendre l'oracle d'or, Pâle d'une vaine espérance, Sur le trépied froid du silence, L'expansion retombe encor.