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vœu A LA POÉSIE. 435 Qui n'avons pas éteint toute pure auréole, Et donné le saint nom à quelque infâme idole, Des sacrilèges mains défendons tour à tour L'amour et l'art, et Dieu qui fit l'art et l'amour» Ne brûlons pas d'encens aux pieds de la matière ; Suivons l'austérité, notre nourrice altière ; Dans la plus humble plante où l'a caché le ciel, Allons droit au vrai beau comme l'abeille au miel ; Adorons et prions partout où se devine Quelque trait détaché de la beauté divine. Pour un épi de plus, d'avides moissonneurs Proscriraient du printemps les oiseaux et les fleurs, Et ces hommes charnels, que le pain rassasie, Disent en nous raillant: Que sert la poésie? Ils briseraient le luth, cette autre voix de Dieu, Pour en joindre l'ébéne au tison de leur feu ; Et, comme un mendiant, leur avarice étrange, Si l'ange entrait chez eux , en aurait chassé l'ange. Ah ! faisons une place à l'hôte radieux , Puis, en cercle rangés, tenons sur lui les yeux, Il se laissera voir avec ses blanches ailes, Sa couronne étoilée aux larges étincelles, Et nous irons en chœur baiser ses beaux pieds nus, En l'écoutant chanter des hymnes inconnus. Sans cesse entourons-le d'un culte expiatoire, Et défendons-le bien notre ange au front d'ivoire; Ils voudraient le courber à creuser des sillons Et ternir ses doigts blancs à compter leurs millions ! Nous, dont]les cœurs nourris en de chastes enceintes, N'ont point encor perdu le sens des choses saintes,