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                  MADEMOISELLE DE MAGLAND.                         147
appris à Mlle, de Magland les chansons napolitaines qu'elle chante
si bien, et la tarentelle où elle excelle, et il s'apprêtait à leur faire
faire parade de leurs talents, lorsque je m'aperçus queM me dela
Rochemarqué était fort choquée de cette intrusion ; j'engageai tout
bas Raoul à abréger cette scène qui me mettait fort mal à mon
aise. Nous revînmes le soir au Genêt, et j'allais me mettre au lit,
quand Alix entra dans ma chambre avec la physionomie que vous
savez qu'elle se compose, quand elle a quelque chose de fâcheux
à dire :—«Que je suis désolée, ma cousine, que vous n'ayez pas pris
garde aux signes que je vous faisais, quand cet étourdi de M. de
Blossac a introduit cette bande de Bohémiens dans le salon de
Mme de la Rochemarqué. » — Je ne devine pas, répondis-je, quel
si grand malheur a pu résulter de mon inattention, pour vous af-
fecter ainsi.— Ce devrait pourtant en être un pour vous, ma chère,
d'avoir déplu à la mère de Raoul ; vous savez qu'elle n'est pas ar-
tiste , appuyant sur le mot, et non seulement elle a trouvé fort
inconvenant qu'on ait reçu ces gens-là, mais encore que, précé-
demment , votre père vous eût permis le moindre contact avec
eux. Je ne vous cache pas qu'elle est fort courroucée. — Je tâche-
 rai de faire ma paix avec elle, quant à présent, laissez-moi dormir,
je meurs de sommeil. — J'étais blessée au vif de l'espèce de
triomphe qui se lisait dans les yeux de ma cousine, pendant qu'elle
 me faisait l'énumération de mes torts prétendus, et je ne voulais
pas lui laisser voir combien j'en souffrais, mais quand je fus seule,
je me laissai aller à de tristes réflexions.
    Un des malheurs de mon caractère, est d'être rebelle jusqu'à
l'obstination à tout ce qui me semble faux ou irrationnel, et je
 sens que je ne comprendrai jamais la nécessité de se tourmenter
 pour des choses qu'on ne trouve ni dans son bon sens, ni dans
 son esprit. La morale et la religion du cœur servent d'appui aux
 hommes qui ont une carrière bien plus difficile à parcourir que
 la nôtre, pourquoi ne nous suffiraient-elles pas bien plus sûrement
 de règles de conduite, que ses prétendues lois auxquelles il se-
 rait si facile de s'astreindre, si l'on avait le moindre intérêt à
 cacher ses actions ? Je ne sais si je m'abuse, mais à en juger par
 îa manière dont la mère de Raoul envisage et explique cette im-