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Ift6 MADEMOISELLE DE MAGLAND. convenances, » selon sa phrase habituelle. Il plait pourtant à tout le monde ; vous l'aimerez, Sara, quand vous le connaîtrez ; mon père et mon oncle en raffolent ; Alix elle-même, malgré son mépris pour tout ce qui tient aux arts, directement ou indirectement, le voit d'assez bon œil. 11 semble, au reste, ne pas s'aperce- voir le moins du monde du peu d'aménité de Mme de la Roche- marqué, ou tout au moins agit-il comme s'il ne s'en apercevait pas. L'autre jour, nous dînions à Hauterive, je m'apprêtais à supporter courageusement une journée qui menaçait d'être mor- tellement ennuyeuse, retranchée derrière doux ou trois douairières des environs qui sacrifiant à leur dieu, ou plutôt à leur démon fa- vori, jouaient sans repos ni trêve; on n'entendait sortir de leurs bouches que les mots techniques strictement nécessaire à la rude besogne qui les captivait. Les hommes étaient au billard , ex- cepté mon père, Raoul et M. de Blossac qui fumaient sur la terrasse. J'étouffais de mon mieux les bâillements qui me montaient à la gorge, lorsque mon père, se montrant à la porte, me fit un signe. — Veux-tu venir à l'atelier de Baudéant, tu y trouveras d'an- ciennes connaissances, me dit-il. —Enchantée d'échapper à la gêne que m'inspire toujours la présence de M™ de la Rochemarqué, je me hâtai de le suivre. Je trouvai chez Raoul une pauvre famille napolitaine que nous avions rencontrée dans nos voyages, chantant le jour pour avoir le gîle du soir. Ces malheureux s'étaient pré- sentés à la porte du château, où Raoul les avait reconnus et ac- ceuillis. M. de Blossac les avait déjà posés, et faisait un croquis du groupe pittoresque que formaient le père, la mère, deux petits garçons et une charmante jeune fille qui avait été ma favorite, pendant les quelques jours que je la vis en Italie. Quand M. de Blossac eut fini son dessin, nous leur donnâmes quelque argent, et ils s'en allèrent. En descendant, nous les retrouvâmes dans la cour entourés des domestiques qui s'étonnaient fort qu'on eût admis de pareils vagabonds ; alors, voilà M. de Blossac qui, pour leur procurer une plus abondante aumône, se met en tête de les faire entrer au salon, et avant que Raoul ait eu le temps de s'y op- poser, il les pousse devant lui, et les présente à Mmc de la Roche- marqué, ayant grand soin de dire que c'est la jolie Zanetla qui a