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EXPOSITION DE 1843-1844. 95 Les portraits de M. Dupré ne sont ni meilleurs, ni plus mauvais que les années précédentes; son coloris est toujours sombre et faux. Dans le portrait de M me C. les chairs sont moins violacées que dans celui de Mlle L. mais elles ont un ton sale presqu'aussi désagréable. Nous avons vainement cherché l'expression spirituelle de la phy- sionomie de M me C. dans cette tête mal dessinée, dont le côté qui devrait être le plus petit se trouve malheureusement le plus grand ; ce qui, il faut en convenir, peut bien nuire un peu à la ressemblance. Les bras et les mains peints d'une manière fort négligée, sont hors de toutes proportions. La guipure, qui serre la poitrine d'une façon peu gracieuse, est touchée aussi durement que si M. Dupré eût eu à rendre les reliefs d'une armure. Tous les défauts que nous venons de signaler, disparaîtraient bien vite , si M. Dupré, dont on ne peut mettre en doute l'adresse pratique, avait moins de disposition à contenter promptement ses amis, qu'à satisfaire sa propre con- science. Nous sommes loin de blâmer un penchant qui fait honneur à la bonté de son caractère, mais nous voudrions qu'il le conciliât avec l'intérêt de sa gloire à venir. M. Vibert qui expose pour la première fois, a deux portraits au crayon dont le moindre mérite est celui d'une excessive ressemblance. Un travail précieux sans sécheresse, égal sans monotonie, une touche franche et fine à la fois, s'y font remarquer à un haut degré. Dans le portrait de M1Ie D., l'exécution de la partie principale, la tête, est irréprochable; on ne peut rien trouver de plus finement modelé, ni de plus élégamment dessiné. L'expression de la physionomie parfaitement sentie est rendue sans affectation et avec infiniment d'esprit. Les portraits de M. Vibert nous ont appris que le crayon pouvait avoir un coloris que le pinceau n'atteint pas toujours, et que nous pouvions compter un talent de plus parmi nos talents d'élite. M' le Chirat, que nous regardons comme une des nôtres, nous a envoyé des miniatures à l'huile qui attestent de ses progrès émi- nents, et un portrait de Delsarle aussi ressemblant que bien peint. L'on peut considérer comme portrait Y Amour maternel de Mlle Dabry, la pureté des lignes de cette charmante étude, annonce qu'elle a été faite d'après le modèle; les mains, quoique bien étu- diées, sont d'un type vulgaire qui n'appartient pas à la tête. M lle Pabry est appelée à prendre une place distinguée parmi nos por- traitistes ; elle joint à l'élégance du dessin une vérité de coloris et une adresse de brosse fort remarquables. Les portraits de M. Lavergne n'ont peut-être pas une couleur bien solide, mais sont estimables par plus d'un côté. Ce peintre sait beaucoup, mais n'exprime pas toujours aussi bien qu'il sent. Joindre l'élégance et la fraîcheur du pinceau de Redouté à l'har- monie de Van Huysum, à la vigueur d'effet du Titien, qui excel- lait à rendre la nature morte, telle est la fusion savante que M. St- Jean a réalisée. 11 était impossible de grouper des fruits avec plus