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souvent assez précieux ; il en ordonne l'emploi, en fumiga-
tions, pour les phthisiques-lymphatiques; en poudre, pour les
cerveaux qui demandent des sternutatoires ; mais il ne peut
supporter l'idée que l'on trouve quelque charme à respirer
une odeur acre et stupéfiante, ou à se remplir les fosses nasa-
les d'unepoudre irritante. Ce sont là ses propres paroles. Je
lui abandonne volontiers les partisans du fin et du râpé ; leur
sort ne me touche que médiocrement, et, d'ailleurs, malgré
sa grosse voix, M. le docteur n'est pas bien méchant. Quant
 aux fumeurs, c'est autre chose. Ayant fait partie moi-même
de ce corps respectable, je ne puis permettre qu'on maltraite
devant moi mes anciens confrères, et je touche à l'écu de M.
le docteur.
   « Après la découverte du Nouveau-Monde, dit-il, le tabac,
jusqu'alors inconnu ou dédaigné, vint tout à coup occuper
une grande place dans les habitudes humaines, etc. » Je
trouve tout naturel que le tabac fût inconnu des Européens
avant cette époque, puisqu'ils n'avaient pas encore traversé
l'Atlantique; mais qu'il fût dédaigné, c'est ce queje ne com-
prends guère. Dédaigné, et par qui? par l'ancien monde ?
mais pouvait-il repousser ce qu'il ne connaissait pas? Si vous
voulez dire qu'il fut dédaigné par les indigènes de l'Amérique,
oh ! ici je vous arrête. Le tabac régnait aux Indes-Occidenta-
les avant que nous y missions les pieds, et nous n'avons rien
changé à ses destinées locales. « Son usage, dit M. deHum-
boldt (1) , était répandu dans la majeure partie de l'Améri-
que, tandis que la pomme-de-terre était inconnue avant la
conquête. — Les anciens Mexicains employaient le tabac à
feuilles pétiolées, qu'ils appelaientyetl [nicotiana rustica)[2).
Les Caraïbes fumaient alors le pétun dans des roseaux appe~

  (1) Humboldtj Voyage aux régions équinoxiales. Î5i, ^§.
  (2) Ibid.