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226 il cherche s'il ne découvrira point ces morts chéris qu'il pleura tant à leur départ. Mais le vol de l'ange l'emporte dans d'autres régions où resplendissent les dominations du ciel, les anges, les vierges, les martyrs, les cercles des âmes chantant l'éternel hosannah, et rendant gloire à Dieu de l'épreuve passée comme du bonheur présent. C'est la chaste épouse qui raconte les tristesses de la terre en présence des félicités d'en haut ; c'est l'humble et frêle enfant qui loue Dieu d'avoir été enlevé à ce moude avant que le mal eût flétri son innocence, et qui prie pour un père éploré. C'est le savant qui célèbre l'éter- nelle intelligence ; c'est le pauvre qui s'applaudit de sa glo- rieuse indigence ; c'est le poète oublié qui fait monter à Dieu les accords de sa lyre ; c'est un roi jeté sur la terre d'exil, et qui bénit Dieu pour les amertumes dont fut abreuvé un règne de quelques jours ; c'est enfin le saint prêtre qui s'incline aux pieds du pontife éternel, Jésus-Christ. Tandis que le poète écoute d'une oreille ravie ces hymnes dont le concert monte et descend, voilà que la tristesse a voilé la face de son ange, et qu'un grand tumulte se fait autour d'eux. Les cohortes célestes ont appris que le Seigneur doit anéantir leurs globes, et ils viennent le supplier pour la terre coupable. Leur prière est noble et solennelle, mais ils ont beau se prosterner en face du triangle divin ; l'heure est ve- nue. Les fléaux alors se pressent devant le trône de Dieu ; la guerre, la peste, la famine sont là dociles et prêtes pour leur fatale mission. Le cercle des esprits prosternés en silence Entendant prononcer l'implacable sentence, Jette un cri déchirant; et, d'un vol consterné, Chacun va retrouver son monde condamné. Tels, quand l'horizon noir fait gronder le tonnerre, De timides ramiers réunis dans une aire Se séparent en hâle et regagnent la tour Témoin de leur naissance et chère à leur amour (1), (1) Chant IV, pag. 134.