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   Je ne m'appliquerai pas à suivre les Juifs au travers des
sinistres années qui séparèrent le trône du t r ô n e , la royauté
de l'empire. Les souvenirs de ce sommeil oppressé et fiévreux
de la France sont indépendants de mon sujet ; le catholi-
cisme, le protestantisme et le judaïsme n'eurent plus de nom
en France ; tous les autels furent foulés pêle-mêle sous le
char de la révolution. La France ne distingua plus que des
partis politiques , tous vinrent lui payer des tributs humains,
et la raison dévora toutes les têtes qui lui furent jetées, sans
se demander dans quels temples elles s'étaient inclinées. La
confusion dans le carnage rapprocha les partis et les croyan-
ces; elle les fit s'appuyer, se resserrer e n s e m b l e ; elle fit
taire les haines dans un intérêt commun^ et sur des cadavres
frappés au hasard dans tous les camps , les hommes sentant
leur faiblesse p r o p r e , conclurent ce pacte de charité fra-
ternelle que la corruption et le bonheur prolongé de quel-
ques-uns avaient retranché de l'Evangile. C'est pour cela que
la Révolution roulant bien des ruines , renversant de bien
saintes institutions, porte cependant un caractère de sociabilité
avancée, car elle entraîna de nombreux abus, applanit les
différences conventionnelles élevées par l'habitude du vice,
 et replaça la société française dans ce niveau d'égalité ration-
nelle méconnu trop long-temps et trop vite oublié. La crise
de 89 peut être comparée à une flamme descendue du ciel,
 selon les u n s , sortie de l'enfer, selon les a u t r e s ; toujours
 est-il qu'en ravageant , elle purifia.
    L'Empire et la Restauration respectèrent la liberté de
 conscience, acquise aux Juifs p a r l a tourmente de dix années,
 et sur tous les points de la F r a n c e , les synagogues s'ouvri-
 rent; Lyon eut la sienne ; bientôt j'en parlerai. Cependant
 les pouvoirs r é g n a n t s , reconnaissant le culte catholique reli-
 gion de l'Etat, établirent en sa faveur une différence avan-
 tageuse , et prirent sur le trésor public un traitement pour
 les membres du clergé. Cette institution reposait sur un prin-
 cipe juste, puisqu'elle n'était que la compensation et l'acquit