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320 ligieux; Philippe se fit l'apôtre du baptême : la purification que donne l'Eglise servait de sauve-garde contre la proscrip- tion , e t , grâces à cette condescendance, le Juif obtenait le droit de garder au grand jour ses défauts primitifs ; en un m o t , il devait se faire nommer chrétien sans cesser d'être Israélite. Avant le quatorzième siècle, les propositions de Philippe auraient été fièrement rejelées par les Juifs , et les proscrits m a l h e u r e u x , mais fidèles, se seraient laissés con- damner à tous les tourments plutôt que de fermer l'oreille au cri de leur conscience. Mais, eu 1346, l'intérêt commençait à éteindre la foi de quelques-uns ; la conversion au culte du Christ leur parut une pure affaire déforme qui ne liait pas leur cœur ; autour d'eux, d'ailleurs, les enfants de l'Eglise faisaient si souvent bon marché des principes catholiques, qu'ils p u - rent bien croire à la futilité des doctrines chrétiennes ; aussi, pour conserver et étendre leurs privilèges, plusieurs Juifs se firent bapiiser, sans renoncer entièrement aux ordres du Thalmud. N'était-ce pas en effet se plier à la nécessité du m o m e n t ? Et le Thalmud ne leur prescrivait-il pas d'acheter la fortune en trompant les chrétiens ? Si donc Philippe pensa bien faire en imposant aux Juifs la double alternative du baptême ou de l'exil, il se trompa. L'Eglise ne put pas se glorifier d'un retour imposé à la lâcheté par la crainte : on n'obtint qu'une confession démentie par le c œ u r , et ce parjure se rencontrera trop souvent lorsque l'option ne sera pas entièrement libre de toute appréhension, lorsqu'on remplacera la persuasion par la menace. Hâtons- nous de le dire cependant, la fierté juive n'avait pas fléchi tout entière : si quelques Israélites se courbèrent devant le caprice du prince^ s'ils préférèrent le mensonge à l'héroïsme de l'exil, la généralité de leur nation est restée vierge de cette souillure ; placée entre la confession du Christ et la proscription, elle choisit cette d e r n i è r e , et s'éloigna du royaume> en laissant à ses frères renégats, et son m é p r i s , et l ' o p p r o b r e , et la richesse, et le remords. Comment la