Revue lyonnaise » n°10 ( 1885 ) » pp.170

�70                     LA REVUE LYONNAISE

trois petits morceaux de briques ou de poteries apparaissaient dans
la partie supérieure. Le sommet avait pu subir quelques fouilles,
quelques mutilations; le bas était vierge de toute atteinte.
    A un mètre de terre, une couche de cendres de huit à dix centi-
mètres d'épaisseur s'étendait du nord au midi sur une longueur de
trois ou quatre mètres, en s'abaissant d'une vingtaine de centimètres
environ.
    Nous étions au cœur même du tumulus, qui avait une dizaine
de mètres de diamètre sur deux ou trois de hauteur; je dis de hau-
teur actuelle, car il avait été certainement décapité.
    Nul doute, ici. Notre poype était un tombeau, l'île une nécropole.
    Avec toute la prudence qu'on doit apporter dans les relations à
ouvrir entre deux castes rivales, bourgeois et paysans, je fis des
concessions; j'admirai la forme et la construction du tombeau; je
louai la pensée qu'on avait eue d'en débarrasser le champ; je dis que
c'était une ancienne sépulture des Gaulois, ce nom est connu dans
les villages; et je demandai, simple curiosité de ma part, si on n'y
avait trouvé ni pièces de monnaies, ni armes, ni statuettes, ni débris
 de quelque espèce que ce fût, laissant entendre que je serais prêt à
 les acquérir. Si nous eussions été de l'autre côté de la rivière d'Ain,
 j'eusse parlé la langue des montagnes, demandé mes renseignements
 en patois, et je les aurais aussitôt obtenus. Parlant français, la glace
 fut plus longue à se rompre.
    Un petit vieillard, à l'œil rusé, et qui se demandait quelles inten-
 tions m'amenaient chez lui, me répondit qu'on n'avait rien trouvé,
 mais rien, absolument rien... que des ossements humains, des dents
 de sanglier et une tète fine de ruminant, qui pouvait aussi bien avoir
 appartenu à une jeune chèvre qu'à un chevreuil.
    Le bonhomme penchait pour un chevreuil.
    Je demandai à voir ces restes si précieux. Tout avait été emporté
 à mesure dans le tombereau fatal et dispersé dans les champs.
    Je me promenai aux environs sans pouvoir rien découvrir.
    Je revins et montai sur la poype avec le propriétaire du champ.
    Le fossé qui nous entourait sans lacune était parfaitement rond.
 Il pouvait avoir cent cinquante mètres de circonférence. Si la poype