page suivante »
98 LA REVUE LYONNAISE soit, le nom d'Achille Gamon ne figure dans aucune des manifesta- tions publiques des protestants d'Annonay; et l'on peut raisonnable- ment supposer qu'il se tint jusqu'à la fin dans une moyenne d'opi- nion également éloignée des deux partis politiques, qui, sous nré- texte de religion, se faisaient une guerre acharnée, se consolant sans doute de son isolement par la conviction qu'il était plus qu'aucun d'eux dans la véritable tradition de l'esprit de l'Évangile et de la charité chrétienne. Achille assista, comme premier consul d'Annonay, aux États du Languedoc tenus à Montpellier en 1560, et c'est alors qu'il parut tout au moins incliner vers la Réforme. En racontant ce qui se passa dans cette assemblée, Gamon fait de l'hésitation et du trouble des consciences un rapide tableau qui montre avec quelle pénétration et quelle hauteur de vues il appréciait les divisions religieuses dont il était témoin. Un avocat de Nîmes, nommé Chabot, avait formulé des plaintes fort vives contre le clergé. La crainte d'exciter une sédition parmi le peuple empêcha les prélats, les barons et les autres membres de l'assemblée de le iaire arrêter. Gamon ajoute : « Leurs sentiments étoient d'ailleurs si partagés sur la religion, ils se défioient tant les uns des autres, que personne n'osa proposer la punition de Chabot. Un air de réforme dont les prédicateurs de la nouvelle reli- gion faisoient voir la nécessité séduisoit les uns; la liberté qu'elle iavorisoit, corrompoit les autres; et, dans l'incertitude ou, pour mieux dire, dans l'ignorance de la religion catholique et de la reli- gion réformée, où on estoit, on ne savoit à quelle des deux on devoit s'attacher, quels pasteurs il ialloit suivre. La nouvelle religion fit dans peu de temps des progrès étonnants dans la ville d'Annonay et dans tous les autres lieux environnants, d'où elle se communiqua et se répandit de l'un à l'autre... » Les fonctions qu'avait exercées Achille Gamon, la considération dont il jouissait, et enfin la satisfaction avec laquelle il rapporte le trait de sagesse de ses concitoyens, concluant finalement entre eux un pacte d'accord et refusant de participer aux dernières gug^es civiles, indiquent assez dans quel sens s'exerça son influence' 'ëtfl&î. > . nature des conseils qu'il donna aux religionnaires. Plût à Dieu que