page suivante »
306 LA REVUE LYONNAISE des autres; le vrai chrétien fait tout le contraire, il vit dans lui- même et pour les autres. La perfection s'acquiert par la réforme incessante de l'être intérieur et par le développement de la charité. Sans ce travail persévérant, qui est, à proprement parler, l'hygiène de l'âme, nous pouvons aspirer à l'illustration ; nous n'atteindrons jamais la véritable force et la véritable grandeur. Il y a aujourd'hui, il y aura toujours des hommes qui portent en eux la semence des plus vastes choses, et dont le front majes- tueux est marqué du signe des vocations sublimes. La nature leur a prodigué ses dons ; ils ont un cœur large, une imagination féconde et splendide, une intelligence capable de concevoir l'idéal et une volonté assez forte pour l'atteindre ; . leur regard a la puissance fascinatrice qui attire et domine les foules ; ils disposent des plus grands moyens d'action dont l'homme puisse disposer ; ils ont une parole, une plume, un pinceau, uneépée; ils dompteraient l'univers, s'il savaient dompter leur cœur ; ils pourraient tout sur le monde, s'ils pouvaient quelque chose sur eux-mêmes. Eh bien ! tandis que leurs jours s'effeuillent misérablement au vent des passions, tandis que cette éloquence et cette poésie et tous les trésors de leur grande à me s'épuisent dans la recherche de l'impossible, pour aboutir au dégoût des plaisirs et aux désenchantements de l'ambition, un homme passe à côté d'eux, ignoré de la foule et méprisé de lui- même. Loin de l'abattre, la conviction de son propre néant lui à donné la force, l'humilité lui a fait découvrir ses infirmités cachées, et la prière a appelé à son aide une main divine pour les guérir. Auparavant, il était agité, troublé, inquiet ; ses joies sentaient la fièvre, son âme errante ne savait où se fixer. Le voici dans la soli- tude, le soir s'est fait au dehors. Tout à ses côtés est silence, obscurité. Mais au dedans brille une pure et inaltérable lumière. Les heures s'enfuient ; il ne cherche pas à les retenir, car il a trouvé le bonheur dans le calme de l'âme. Disparaissez, fausses jouissances, folles vanités, ambitions dévorantes ; vous n'êtes rien en face de cette humilité qui possède la foi et l'amour. Purifié par le recueil- lement, transfiguré par le sacrifice, cet homme touche enfin à ces hautes et sereines régions où vous n'avez pas d'accès. Il goûte en même temps le charme du mystère et le grand jour de la certitude ; à travers un doux crépuscule,il aperçoit le reflet de la clarté incréée ;