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290 LA R E V U E L Y O N N A I S E
Heureusement il y a : Lt Refuges, cette première partie que plus haut je
séparais nettement du- reste du volume.
C'est une galerie de tableaux, d'esquisses, de pastels, d'eaux-fortes cham-
pêtres du charme le plus exquis. Là M. Rollinat ne cherche plus à imiter per-
sonne, il est lui-même, et je lui en fais mon bien sincère compliment. La
nature, cette grande enchanteresse, l'a merveilleusement inspiré. Il s'est servi
avec bonheur de plusieurs vieilles formes de vers français. Qu'on lise la Ballade
de V Arc-en-Ciel, celle de la Reine des Fourmis et du Roi des Cigales, celles du
Vieux Baudet, de la petite Rose et du petit Bluet, des Lézards verts, des
Nuages, du Châtaignier rond, des Barques peintes ; la villanelle du Soir,
celle du Ver déterre, on est captivé par cette poésie émue, pénétrante, Quelles
délicieuses bluettes aussi que ces courtes pièces : Les fils de la Vierge, le Lise-
ron, les Pâquerettes, la Petite souris, la Mort des Fougères. Quels tableaux
achevés que : Les Roses, l>s Grives. Je m'arrête, parce qu'il faudrait presque
tout citer.
Que M. Rollinat revienne donc sans retard à cette Muse rustique qui lui a
dicté ces Refuges si véritablement poétiques. Qu'il rejette loin de lui les oripeaux
malsains de croque-mort dont il a eu la malencontreuse idée de s'affubler. Son
jeune talent n'a pas besoin de ces exagérations qui prendraient les apparences
d'une gigantesque et compromettante réclame. Sortez de l'ombre, poète : votre
place est sous le grand soleil de Dieu. Vous avez assez chanté les morts : chan-
tez maintenant celle qui ne meurt pas, l'éternelle, l'impérissable Nature. Elle
vous tressera de vertes et odorantes couronnes qui siéront mieux à votre front
que la noire guirlande du cyprès. G. L A V E N I R .
SIXTE-QUINT, par M. le baron de HUB.NEE. — Nouvelle édition. — Librairie
Hachette et Gie, 79, boulevard Saint-Germain, 2 vol. in-18 Jésus; prix : 7 fr.
Une nouvelle édition de l'importante monographie consacrée par le baron de
Hiïbner, diplomate autrichien, au pape Sixte-Quint, vient de paraître. Elle est
précédée d'une lettre fort intéressante écrite à l'auteur par M. le comte de
Montalembert, la veille même du jour où mourut, ce brillant écrivain.
Le mérite tout particulier de cet ouvrage, c'est le choix consciencieux et la
parfaite authenticité des documents avec lesquels il a été composé. Les corres-
pondances diplomatiques inédites -tirées des archives d'État du Vatican, de Si-
mancas, de Venise, de Paris, de Vienne et de Florence sont les sources où M. de
Hùbner a le plus largement puisé. Avec ces précieux matériaux, il reconstitue
l'histoire impartiale et çxacte de ce grand pape, odieusement travestie par
Gregorio Leti et sur laquelle un historien allemand, M. Léopold de Ranke,
avait commencé à faire la lumière.
Au moment où, après des intrigues sans nombre dont l'auteur démêle patiem-
ment les fils, Montalto fut élu pape, l'Italie était loin d'être dans une situation
brillante. Dans les dernières années du pontificat de Grégoire XIII, son prédé-
cesseur, il y avait près de vingt-sept mille bandits dans les Etats Romains. A
peine monté sur le trône, Sixte s'acharne à leur poursuite ; il frappe avec la
dernière vigueur tous ceux qui osent enfreindre les lois. La haute naissance, la