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312                    LA R E V U E LYONNAISE
   La Recherche de la venté eut six éditions du vivant de l'auteur
— chiffre fort respectable pour un livre de philosophie, — et alla
grossissant par des additions successives à chaque édition nouvelle.
   L'édition de M. Bouillier diffère des plus récentes, notamment de
celle de M. Jules Simon, en ce qu'elle est complète ; car ellecontient
tous les éclaircissements si importants que l'auteur avait successive-
ment ajoutés à chaque édition et que M. Jules Simon a cru pouvoir
supprimer,, Elle en diffère encore par le soin qu'a eu l'écrivain lyon-
nais de suivre exactement l'édition de 1712, la dernière qui ait été
publiée par Malebranche et qu'il regardait lui-même comme la
plus exacte et la plus ample de toutes. Ajoutons que M. Bouillier l'a
fait précéder d'une introduction magistrale, où il expose avec sa supé-
riorité ordinaire les doctrines du grand philosophe de l'Oratoire, et
qu'il l'a enrichie de notes où il explique les passages qui ont aujour-
d'hui besoin d'explication et indique les additions et changements
qui distinguent cette édition des précédentes.
   Nous n'adresserons à M. Bouillier qu'un seul reproche, c'est de
s'être borné à nous donner une édition de la Recherche de la
vérité. Il nous devait une édition des œuvres complètes de Male-
branche qui nous manque encore. Personne n'était plus autorisé que
lui pour l'entreprendre et ne l'aurait mieux menée abonne fin, en se
ménageant le concours de quelques jeunes collaborateurs qui au-
raient tenu à honneur de marcher sous sa direction. Une telle édi-
tion aurait été accueillie avec faveur par les philosophes qui voient
en Malebranche l'un des deux ou trois grands métaphysiciens de
notre pays, par les lettres qui recherchent avidement tout ce qui
respire la finesse et la grâce, par les âmes d'élite qui se laissent ravir
au souffle religieux courant à travers toutes les pages de ses livres,
et on ne reprocherait plus à la France, comme l'a fait Joseph de
Maistre, de négliger le Platon chrétien qu'elle a porté dans son sein
pour des parleurs vulgaires qui ne sont pas dignes de dénouer les
cordons de ses souliers.
                                                        FERRAZ,
                                    Professeur à   la   F a c u l t é des l e t t r e s .