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284                  LA REVUE LYONNAISE
 le rendait cher à tous. Sa vie, trop courte, avait ouvert l'espoir
 d'un avenir glorieux ; sa mort a laissé à ses parents une dou-
 leur sans fin. » — « Inutilement », est-il dit sur l'épitaphe d'un
jeune homme de vingt-huit ans, de la profession de changeur,
 « inutilement il a imploré tous les dieux ; ils l'ont enlevé à la fleur
 de sa jeunesse. » — Simple et vraiment touchant est le souvenir
 d'une jeune femme, morte à vingt-quatre ans : a Elle a vécu sans
 tache, pure de cœur, heureuse encore de mourir la première. »
 — Une femme loue son mari, un vétéran, d'avoir été « son nour-
 ricier par son travail, son père par son amour pieux, son patron
 par ses bienfaits », et sa fille ajoute ses regrets de ce qu'il ne lui
 a pas été accordé de pouvoir « fermer les yeux de son père, à qui
 des hommes méchants ont ôté la vie ». — I l y a quelque pré-
 tention philosophique dans cette phrase d'une épitaphe diffuse et
 embrouillée, rédigée par un homme qui s'est au mépris de la mort
 précipité dans les flammes d'un incendie et a été écrasé par la
 chute d'un mur : « 11 a rendu à la nature son esprit social et le
 corps à son origine ». Mais de telles expressions sont peu fréquen-
 tes dans les épanchements des gens du commun, et ces sincères
 témoignages du sentiment populaire nous offrent rarement une
parole d'où nous puissions conclure, comme certains savants le
prétendent, que cette classe ait eu la croyance à l'immortalité de
l'âme et à une autre vie après la mort. Il est vrai que le matéria-
lisme n'apparaît pas partout d'une manière aussi grossière que
 dans des invitations comme celles-ci : « Toi qui liras ces lignes,
mange, bois, amuse-toi et viens, » ou bien comme il se montre
sous une forme plus concrète encore dans cette épitaphe d'une
femme morte jeune : « Toi, lecteur de ces lignes, va aux bains
d'Apollon, ainsi que souvent je l'ai fait avec ma femme et vou-
drais bien pouvoir le faire encore. •» La direction de la pensée vers
la vie terrestre est le caractère marquant de presque toutes ces ins-
criptions. Repos aux morts, jouissance et plaisir aux survivants,
telle est la morale de la plupart des épitaphes païennes. Le détache-
ment de l'éphémère et misérable monde terrestre, l'espérance d'une
autre vie, la consolante foi de se revoir après la mort ; ces chan-
gements dans la manière d'envisager les destinées de l'homme,
le christianisme les a le premier apportés, et c'est un tout autre